L'Oreille interne , ou Dying inside dans sa langue originale , est un roman de science-fiction de l'auteur américain Robert Silverberg publié en 1972. Auteur prolifique , ayant traversé les strates de l'histoire science-fictionnelle avec peu de fausses notes , Robert Silverberg est un autre de ces noms qui inspirent , de facto , le respect. L'Oreille interne est sans doute son roman le plus connu , et le plus acclamé , mais on pourrait aussi porter à son crédit Les monades urbaines qui furent adapté au cinéma il y a deux cela sous le titre High Rise , ou encore son cycle de Majipoor qui se rapproche plus de la fantasy.
Dans ce roman , nous sommes témoins de l'embrasement interne de David Sellig , quarantenaire , juif New-Yorkais et mutant télépathe. Alors , ici pas de pouvoir dément à la Charles Xavier , mais plutôt un handicap profond qui empêche à Sellig de témoigner un attrait assuré pour la vie social ( vous vous imagineriez , vous , développer des liens avec vos congénères quand leurs démons et leurs pensées les plus obscurs , même inconscientes , vous sautes à la gueule sans que vous puissiez rien y faire ?). Pourtant , alors que ce don qu'il avait toujours maudi semble en train de s'éteindre petit à petit , David est au comble du désespoir : ce qui le rendait unique s'évapore le laissant sur le carreau.
Commencer à connaitre Silverberg par ce livre , c'est sans doute la meilleure chose que j'ai faite depuis le début de cette année ! Quel talent , nom de Dieu ! Pas un instant de répit , aucun superflu. Tout est à sa place , tout est finement organisé pour vous faire ressentir le désespoir de cet être supérieur se mourant peu à peu dans l'indifférence total des gens qui composent son entourage. De ce joyau de la nature réduit à un travail de nègre pour le compte de quelques étudiants en lettres , aussi antisémites que stupides. De cet homme , finalement , qui est l'auditeur d'un brouahaha ininterrompue depuis l'aube de ses jours et qui , malgrés tout , a toujours vécu dans un silence perturbant.
N'importe quel vrais solitaire ne peut que se reconnaître en Sellig. Certes , il est un mutant mais il est avant tout la représentation brute de l'homme démoli , de l'être ballotté entre richesse et pauvreté , de ce Loup des Steppes qu'Herman Hesse tenta - vainement , à mon goût - de représenter dans son ouvrage du même nom. Silverberg met d'ailleurs ici un coup de pied dans la fourmilière en synthétisant le monde du grand classicisme littéraire avec des références à la philosophie , au théâtre grec et à la littérature universelle en général , et tout cela au creux d'une oeuvre qui ne peut être considéré que comme l'héritiere d'une tradition SF.
Une lecture enrichissante , érotique , drôle et putain de belle , bordel ! La définition même du mot classique.

Le-debardeur-ivre
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Créée

le 18 avr. 2017

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