On a prêté un peu trop vite le nom du Livre des Merveilles à Marco Polo... Je lui reprends sans états d'âme pour l'attribuer à ce carnet de voyage !
« Impossible d’être étranger au monde, et pourtant on aurait bien voulu »
Nicolas Bouvier écrit avec ses sens... pas le moindre petit bled visité sans que ne jaillissent une multitude de sensations, d'émotions. Il n'a de cesse que ses souvenirs, si parfaitement consignés deviennent nos rêves.
« Il y a des villes trop pressées par l’histoire pour soigner leur présentation »
Loin de l'actuel tourisme, du toujours plus loin, plus vite, toujours plus de sensations, plus de selfies... où l'on ne vit pas un pays mais on le consomme (à la manière du XIXème siècle les touristes anglais méthode Baedeker), ici chaque découverte se gagne, chaque aventure imprègne l'âme parfois douloureusement. Rien n'est numérique tout est authentique ! Et qu'importe si le temps déborde.
« Moi, je crois plutôt ceci : des paysages qui vous en veulent et qu’il faut quitter immédiatement, sous peine de conséquences incalculables, il n’en existe pas beaucoup mais il en existe »
Et que dire de ce style... Précis, poétique, imagé, drôle, limpide... Je n'ai jamais posé autant de signets sur un livre... Chaque phrase se transforme en citation... Les mots sont autant de pépites à l'éclat sauvage et précieux qui n'ont comme unique utilité de nous faire partager ces merveilles, ces impressions, ces moments vécus...
« Impossible d’être étranger au monde, et pourtant au aurait bien voulu »
On classe cet ouvrage comme culte... il est bien plus que cela... Il est à la fois leçon de vie, de choses et d'histoire... L'humanité dans ce qu'elle a de plus précieux, motivant et rassérénèrant. Et l'action a beau se situer en 1963, et que les sites et paysages ont certainement évolué, le périple de Nicolas Bouvier et Thierry Vernet (l'illustrateur) résonne encore aujourd'hui, car bien plus qu'un voyage carte postale, ils ont su trouver l'âme des lieux, la comprendre, s'en imprégner et se faire discret face à tant de merveilles.
« L’hiver vous rugit à la gueule, le printemps vous trempe le cœur, l’été vous bombarde d’étoiles filantes, l’automne vibre dans la harpe des peupliers et personne ici que sa musique ne touche »