Intérechiant
Très précis et fourni. Ne pas se lancer sans des base (très) solides sur le Moyen-Âge central.
le 7 août 2020
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Parfois, je me demande vraiment ce que la France et les "Français" n'ont pas inventé sur cette planète. Oui, je suis un peu chauvin et j'aime énormément mon pays et sa culture. Si ma critique débute de manière aussi provocante, c'est qu'en effet les codes de la chevalerie, au sens où on les entend aujourd'hui (galanterie, défense de la veuve et l'orphelin, etc.) sont nés en France. Les prémices sont perceptibles dès le XIème siècle, mais la "recherche" des codes de la chevalerie, par les hommes de l'époque, sont bien antérieurs. En effet, nous pouvons faire des rapprochements dès les Mérovingiens au VIème siècle de notre ère. Organisé en six chapitres, ce livre s'attarde beaucoup sur l'origine de ces mœurs guerrières pendant les 200 premières pages comme suit : Chapitre 1. La vertu Germanique ; Chapitre2. Les Vassaux dans le monde Carolingien ; Chapitre 3. Une féodalité sans barbare ; Chapitre 4. La mutation chevaleresque ; Chapitre 5. Croisade et Chevalerie ; Chapitre 6. Autour des Princes du XIIème siècle et la conclusion.
À la lecture de cet ouvrage par Dominique Barthélemy (enseignant de l'histoire médiévale à Paris Sorbonne IV et à l'Ecole pratique des hautes études), vous comprendrez à quels besoins répondaient ces codes, ces pratiques, ces comportements, cette volonté finalement d'avoir un référentiel commun de codes de conduite. Car la chevalerie est au croisement du monde temporel et du monde spirituel. Du monde temporel, car il était nécessaire dans un royaume de France balbutiant et où la rivalité entre les suzerains et vassaux est permanente, que les hommes répondent à des codes d'honneur pour éviter de se massacrer à longueur de journée. Il était nécessaire dès le VIème siècle et jusqu'au XIVème siècle, que les hommes trouvent des références communes, des us et coutumes militaires mais également civils pour trouver la paix. Nous sommes quand même à une époque (VIème - VIIème siècles) où la société médiévale s'organise autour de familles et de clans puissants pratiquant sans vergogne le faide. C'est-à-dire un système de vengeance privée d'origine germanique (comme les Francs, donc importés par eux-mêmes) reconnu comme légal et légitime : "tu tues mon père, mon frère, j'ai donc le droit de faire de même et je vais même buter toute ta famille". Bref, l'escalade de la violence. Je caricature un peu car la pratique du faide était très codifiée, mais impossible de former une "nation" (pardonnez-moi pour cet anachronisme), un royaume avec de telles coutumes.
Enfin, la chevalerie est au croisement du monde spirituel car, si dans un premier temps le clergé voit d'un mauvais œil cette pratique et ces codes (adoubement et tournois notamment), l'Eglise s'emparera de ces pratiques pour leur conférer une dimension religieuse. Se comporter en chevalier devient par essence une quête spirituelle en soit. L'Eglise en profitera à ce moment-là pour déclencher les Croisades lors desquelles, les-dit chevaliers partiront défendre la foi chrétienne en Orient. L'Eglise jouera également un rôle majeur dans la constitution de cette chevalerie en la bordant dans un premier temps puis en lui donnant du sens, autre que la virilité pure, militaire et l'esprit de panache qui semblait la caractériser au départ. La chevalerie est un moyen de faire peuple, c'est un moyen de se souder face au véritable ennemi en dehors des frontières (les Germains, les Sarrasins). Ce que l'historien nous montre dans ce long ouvrage, c'est que la culture franque au travers des Mérovingiens puis des Carolingiens s'en est sortie grandi d'avoir, au fil des siècles, adoptée, absorbée même, les codes de ce qu'on appellera au XIème et XIIème siècles, l'esprit chevaleresque.
La Chevalerie de Dominique Barthélemy est un ouvrage passionnant. Il ne s'adresse pas aux néophytes mais plutôt aux historiens en herbe. Très peu ludique, technique et dense (600 pages aux éditions de poche Tempus), organisé de manière très hiérarchisée comme à l'Université, ce travail généraliste est une excellente première approche du monde de la chevalerie même s'il nécessite, au préalable, une bonne compréhension du monde médiéval dans son ensemble sous peine d'être imbuvable. Je recommande.
Créée
le 23 oct. 2022
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