La première chose qui m'a frappé quand j'ai commencé à feuilleter cet ouvrage, c'est le très grand nombre de notes : trois-cent-quarante-et-un pour être exact. Cela fait en moyenne deux et demi par page. En soi, cela ne me dérange absolument pas mais si on regarde le texte de près, on voit qu'il est rempli de chiffres, d'italiques, de guillemets, de citations courtes ou longues, et aussi de quelques encadrés. On tombe un peu dans le name-dropping et cela nuit à la fluidité de lecture. J'ai quand même pu tout lire très rapidement. Rapidement et plutôt facilement, enfin la plupart du temps. Car lorsque l'auteur cite des passages ou des propos plus philosophiques, ça devient malheureusement plus confus. Ce qu'il y a de pertinent dans ce travail de journaliste c'est d'esquisser un portrait très large de cette grande nébuleuse du repli sur soi. Vincent Cocquebert le fait de manière plus impressionniste que structurée : par petites touches il nous parle d'objets, de loisirs, de mouvances politiques ou encore de films qui marquent une époque plus qu'une génération. Cette danse avec les tendances a eu beau me donner un peu le tournis, elle n'est pas exhaustive pour autant. J'ai été un peu surpris que la mancave ne soit pas citée. Un peu déçu aussi de ne lire aucun mot sur les caissons d'isolation sensorielle. Il faut dire que les exemples sont innombrables, en cela on peut parler de fait psychosocial total.
C'est le premier livre que je lis sur le sujet et moi qui aime aller du général au particulier, je dois dire que cette approche multidisciplinaire me convient tout à fait. Il y a tout de même un domaine qui est mis en avant : la politique, notamment ce que les américains appellent identity politics. Quand on est universaliste et qu'on prône l'ouverture à autrui, il faut bien sûr critiquer cette tendance au repli identitaire. J'ai juste été un peu surpris qu'il en soit autant question car pour moi le cocon est plus lié à l'intime qu'au militantisme. Mais après tout, les valeurs elles aussi peuvent être qualifiées de "refuge"...
Je m'attendais à ce que ce court essai traite surtout de fuite et finalement il parle beaucoup de lutte. Mais c'est vrai que tout est politique, même le repli sur soi. On peut peut-être essayer de dépasser ce dualisme comme ceci : on se bat pour ne plus avoir à se battre. Le combat est normal, vouloir qu'il cesse l'est tout autant. À condition de ne pas confondre paix civile, paix intérieure et paix de son intérieur.