C'est vrai que cela ressemble à une tarte à la crème mais quand même, il y a comme un air de famille entre certains auteurs des Editions de Minuit (Echenoz, Oster, Viel ...), fait de minimalisme, d'humour subtil, de mélancolie sourde, de concision ironique. Tanguy Viel, par exemple, se permet une jolie mise en abyme dans La disparition de Jim Sullivan, nous conviant à la fabrication d'un éventuel roman, un making of, en profitant pour s'interroger avec la malice qu'on lui connait sur les ingrédients à ne pas oublier pour composer un ouvrage typiquement américain, chose peu aisée pour qui se revendique auteur on ne peut plus français. Cette gageure, Viel la tient sans forcer son talent sur 150 pages, prenant le lecteur à témoin, tout en déroulant son intrigue, certes classique et modérément passionnante, avec une nonchalance élégante. C'est évidemment drôle, cultivé et un brin flottant comme des épis de blé dans les grandes plaines américaines. Il y a une atmosphère à la Key Largo dans ce faux vrai roman, une réflexion sur l'art de la fiction et la cuisine que chaque écrivain mitonne dans un coin de sa tête.