La Femme du tigre
7.4
La Femme du tigre

livre de Téa Obreht (2010)

Voilà une première oeuvre assez étonnante je dois dire, écrite par une jeune femme de 25 ans, d'origine serbe et émigrée aux States, Tea Obreht. Ce livre surprend par son thème (un mélange de souvenirs personnels et de légendes), son lieu tristement exotique (une ville menacée par la guerre, un village des Balkans isolé dans les montagnes) et ses protagonistes mi-réels, mi-fabuleux (un vieux docteur résistant, un homme qui ne meurt jamais, un tigre perdu, et ...la femme du tigre). Obreht met un talent fou à faire se percuter les fables locales (ou nées de son imagination) et l'actualité prosaïque de son héroïne, médecin en mission. Ce premier roman est assez bluffant.


L'image du tigre traverse tout le roman, véhiculée par des souvenirs de l’héroïne, qui allait tous les jours avec son grand-père voir les tigres du zoo. Ces mêmes tigres que libérera la guerre, et ce tigre en particulier qui élut domicile près d'un village, au grand dam de ses habitants. "Le livre de la jungle " de Kipling est (littéralement) une des clés de ce livre.
La rencontre avec le fantastique, est très bien menée, dans une danse légère entre des anecdotes actuelles (un orphelinat et la mission humanitaire de la narratrice, des réfugiés, des corps oubliés sous la vigne ) et le passé de ce grand-père héroïque juste décédé qui revient en mémoire et dont la narration apporte un éclairage étrange sur les mystères du présent. Les héros de Obreht sont des rationalistes confrontés à l'étrange.


Si la narration est habile (l'entrelacement de la vie personnelle au présent et des épisodes surnaturels du passé est très rusée), le propos du livre est assez peu clair pendant un bon moment, il faut bien le dire, avant de prendre heureusement son sens sur la fin.
Mais s'il faut faire un petit effort d'attention au départ côté histoire, on est par contre récompensé d'emblée par une écriture que j'ai trouvé superbe. Il y a comme une perfection classique dans la prose de cette jeune auteure qui donne l’impression de lire l'oeuvre d'un vieux roublard de la littérature genre James ou Nabokov. C'est assez impeccable, mûr, riche et totalement maîtrisé. Très impressionnant (en VO américaine, je précise).


Une lecture inhabituelle dans ses thèmes, une écriture très pointue pour un premier roman, et une une imagination un peu sombre mais très satisfaisante. Obreht est une nouvelle venue à suivre donc ! Recommandé, guys et guyzettes!

nostromo
7
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le 24 sept. 2017

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nostromo

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