Anvers et contre tout. Après Trouble, son ébouriffant roman précédent, qui se déroulait dans la capitale flamande, sous occupation allemande, Jeroen Olyslaegers remonte plus loin dans le temps, au milieu du XVIe siècle, toujours dans sa ville de prédilection, avec La femme sauvage. Dans ce nouvel opus, le narrateur, aubergiste désormais exilé à Amsterdam, s'adresse directement à Dieu, lui le maudit qui a perdu trois femmes en couches, et revient sur ses années anversoises, quand son estaminet était le centre de toutes les conversations et de tous les excès. Dire que le livre est foisonnant sonne comme un euphémisme et, bien au-delà de son personnage principal, c'est l'atmosphère de la capitale flamande, au cœur des Pays-Bas espagnols de l'époque, qui tient la vedette. Ville de culture -on y croise Bruegel à plusieurs reprises-, Anvers est surtout traversé par des courants religieux qui se jaugent avant de s'affronter : papistes, calvinistes, luthériens. Le début du roman est exigeant, le temps de s'adapter au style à la fois cru et lyrique de l'auteur et à une narration qui déboussole parfois. Mais les destins de son héros et de sa cité, qui tournent au tragique, vont assez souvent du pittoresque au grandiose, culminant dans la description d'un hiver interminable à pierre fendre et de la "furie iconoclaste" de 1866. Dans un cocktail explosif de fiction et de documentation rigoureuse, l'amour, l'amitié, la violence, l'aveuglement, la trahison, le désir, l'ivrognerie sont les ingrédients d'un récit qui se mêlent en une sarabande furieuse et néanmoins philosophique qui laisse le lecteur épuisé mais comblé et pas loin d'en redemander encore, le bougre.

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le 21 mai 2024

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