La Fille du fossoyeur par Herma
Joyce Carol Oates est un des auteurs les plus prolifiques de la littérature contemporaine américaine. Elle publie presque plus d'un livre par an, et, à la différence d'une auteur francophone bien connue que je ne citerai pas ici mais qui a le même rythme de publication, ses romans font plus que 200 pages en police 14 interligne 2.
Chacun de ces romans est écrit dans un style différent, de manière différente, et les histoires n'ont aucune similarités entre elles, même si elles sont toutes objectivement glauques, et traitent de la violence sous toute ses formes.
Ce livre ne fait pas exception. On suit l'histoire d'une femme qui a connu la violence depuis sa naissance, que ce soit psychologique, de la part de ses parents émigrés Juifs allemands qui ne parviennent pas à s'intégrer dans leur pays d'adoption et regrettent une Allemagne qui a cessé d'exister,ou physique, de la part de son père d'abord, qui pousse ses deux fils à fuir le domicile familial, et , dans un accès de folie, tue sa femme et manque de tuer sa fille, ou de son mari, qui tente de la tuer, la croyant infidèle.
Dans cette première partie du roman, Joyce Carol Oates nous décrit magnifiquement les sensations éprouvées par Rebecca, et son comportement face à ce et ceux qui pourraient lui faire du mal. Elle crée un personnage fort, que l'on admire même, et dont on partage les souffrances et les envies. Mais ce sentiment meurt lorsqu'elle commence à nous raconter la suite des aventures de Rebecca, qui a quitté son mari et s'est enfuie avec son fils. L'auteur déshumanise complètement cette seconde partie, elle ne nous laisse plus que rarement pénétrer dans la tête de Rebecca, passant à un style narratif qui, s'il nous permet de nous concentrer aussi sur les autres personnages, qui deviennent ici plus importants que "l'héroïne", bien que tout ce qui a un rapport avec eux parle en fait d'elle, ne nous permets plus aucune empathie, et nous laisse sur notre faim, parfois même incapable de nous intéresser vraiment à l'histoire.
La dernière partie du roman, épistolaire, sonne faux. Elle se termine très abruptement, et ne nous apporte rien qu'un sentiment de gâchis et d'inachevé.
Difficile de recommander ce livre, mais également difficile de ne pas le faire, car, comme tout les livres de cet auteur, il a des qualités indéniables. La première partie (qui contient en fait la moitié du livre) est fabuleuse. Dommage que le reste ne suive pas.