La Folie Almayer , ou Almayer's Folly : a Story of an Eastern River est le premier roman de l'écrivain britannique d'origine polonaise Joseph Conrad , paru en 1895. Conrad , c'est vrai , c'est avant tout Au cœur des ténèbres , fantastique nouvelle traitant de l'enfoncement d'un officier de la marine marchande britannique au cœur d'une jungle Africaine en quête d'un comptoir depuis trop longtemps muet ,histoire à l'origine d'un des plus grands films de l'histoire du cinéma à savoir Apocalypse Now. Mais Conrad , que nous connaissons de ce coté ci de la manche essentiellement pour ce travail , c'est aussi et surtout une bibliographie riche de plus de dix sept romans et d'une flopée de nouvelles , traitant en une subtile fusion d'aventure et de condition humaine.
La Folie Almayer , premier roman de l'écrivain aventurier , est aussi le dernier roman d'une trilogie - La Trilogie Malaise - qui se compose en plus des livres Un paria des Iles et La Rescousse , faisant tout trois graviter la même poignée de personnages en un environnement commun : la face nord de l’île de Bornéo
C'est là bas , sur les bords de la rivière Pantai , que s'est établit Kaspar Almayer. Issu d'une lignée hollandaise expatriée en Malaisie , il ne connait rien de sa terre natale , si ce n'est le récit nostalgique qu'il put entendre toute sa jeunesse de la bouche de sa mère. Devenu négociant , il se lia d'amitié avec un influent capitaine pirate , Lindgard , qui le poussa à épouser sa fille adoptive , malaise , et s'installer chez lui , à Sambir. Seulement , le vieux pirate , assoiffé d'or et fantasmant une source dans les profondeurs de l’île , disparaît , laissant l'hollandais aux prises avec une épouse aigrie , un voisinage pluriculturel particulièrement hostile et intrigant , et avec comme seul réconfort sa fille métisse , Nina.
Étonnant constat qui me tiraille à la sortie d'une telle lecture. A la fois la quasi totalité des intrigues commerciales , centrales dans le roman , me sont passés au dessus de la tête tant je ne les ais pas comprises , autant le tableau globale du roman est purement génial. Le décor de cette rivière Bornéenne , catalysatrice de toute la solitude qui habite le personnage principal , est fantastiquement étayé par de longs paragraphes descriptifs , tropicaux , dépaysants à souhait !
Conrad a le don de nous plonger en un monde a part , celui de la Malaisie , avec sa cohésion communautaire dans laquelle l'Européen est méprisé , et même humilié.
Pourtant , comme je le disais plus haut , trop d'hésitations dans ce roman le rendent...atrocement long jusqu'aux cents dernières pages qui sont très bien emmenés , très biens dosées . Rien d'insurmontable , car même si il s'étire et intègre des éléments franchement dispensables , il n'est en aucun instant agaçant de bêtise comme cela peut être le cas avec un certain nombre de roman contenant le meme handicap.
D'ailleurs , pour un premier roman , autant dire que la narration y est travaillé avec soin. Si Conrad eut été cinéaste , il aurait sans doute favorisé le plan séquence interactif , liant les actions des personnages de Sambir par le fil de quelques éléments relatifs à la nature. Elle occupe une place très importante - comme dans Au coeur des tenebres par ailleurs - dans toute sa dimension absorbante , démesurée et enivrante. Son utilisation par Conrad n'est pas sans rappeler d'autres œuvres , tel que les films de Werner Herzog ou encore l'EP Rainforest de l'artiste musical Clams Casino.
Au final , un très très grand roman , malheureusement ampoulé de digression lentes qui désamorcent malheureusement trop aisément l'attention du lecteur. Cela reste néanmoins une très intéressante alternative au roman colonial , s'intéressant aux obsessions de l'homme et sa détresse plus qu'à sa superbe délirante.