Synthèse éclairante

J’ai beaucoup aimé cet essai, qui non seulement a mis des mots sur ma pensée, a justifié par les faits certaines de mes positions idéologiques trop abstraites, mais m’a aussi permis de m’ouvrir à d’autres horizons de réflexions politiques.
« La France périphérique » est un ouvrage qui pose un constat sur l’état de la société française à travers le prisme géographique, duquel découle une vision nouvelle des classes, dans laquelle l’ancien clivage urbain/rural n’est plus pertinent. Désormais, l’Etat ultra-jacobin qui concentre l’entièreté du pouvoir et des capitaux dans les métropoles favorise l’émergence d’une classe caractérisée principalement par son éloignement par rapport à ces dernières. Ce sont ces classes populaires de la France périphérique qui ne sont pas représentés politiquement, médiatiquement, et culturellement.
Christophe Guilluy propose une analyse extrêmement pertinente du séparatisme qui s’opère entre les classes dominantes métropolitaines et les classes populaires périphériques, né d’une opposition politique radicale sur les questions de mondialisation et de multiculturalisme (s’expliquant par des facteurs socio-économiques).

Ce séparatisme se prolonge, il se creuse aussi entre les classes dominantes métropolitaines et les classes populaires métropolitaines (banlieues, ZUS…), fondé cette fois-ci sur une opposition idéologique à l’égard de problèmes sociétaux (progressisme, féminisme, mariage gay, théorie du genre etc..).

Et enfin, le séparatisme se glisse aussi au sein même des classes populaires, entre celles de la France périphérique (français de souche ou d’immigration ancienne) et des métropoles (immigration récente), où les bases de la séparation sont ici les problèmes causés par la cohabitation de plusieurs cultures, par l’insécurité physique ou culturelle etc…

Analyse sociologique intéressante de l’évolution du vote des classes populaires de la France périphérique, qui ont délaissé la gauche pour rejoindre le FN ou tout simplement s’abstenir. Guilluy s’intéresse à l’adaptation des partis au électeurs, l’inverse ne se produisant que très peu selon l’auteur. Le FN, initialement reaganien et ultra-libéral, s’est adapté à ses nouveaux électeurs sociologiquement de gauche (récupérés sur des questions identitaires) et s’est approprié les paradigmes politiques protectionnistes et interventionnistes.