Les portes de la guerre se ferment plus difficilement qu'elles ne s'ouvrent

A travers le couple Andromaque/Hector qui se retrouve à peine à la sortie de la précédente guerre, la pièce nous propose le combat impossible des pacifistes face à la frénésie de leurs peuples de s'y précipiter à nouveau. Tantôt contre-pied à la vision épique de la guerre qu'elle soit d'Homère ou de Corneille, tantôt miroir de son époque, l'oeuvre de Giraudoux se veut relativement sobre et courte. En deux actes, le tout est dit, non sans quelques moments comiques pour entrecouper le tragique du mouvement d'ensemble.

Le personnage d'Hélène a toutefois eu tendance à m'agacer et certaines scènes avec elle m'ont paru un peu longue par rapport à ce qu'on en tirait. Hector, de son côté, a toutes les qualités qu'on lui connaît, mais sans l'orgueil et la vanité guerrière des héros antiques. Il agit au contraire comme un père de notre époque, souhaitant plus que tout éviter la guerre à son fils.

Acte I

Il s'agit pour nos deux mariés - après leurs retrouvailles - de convaincre tour à tour Paris, Priam et Hélène de la nécessité de la paix. Pourtant, si chacune de ces joutes orales finissent par pencher en leur faveur, Hector sent bien que la guerre n'en recule pas pour autant ("je gagne chaque combat. Mais de chaque victoire l'enjeu s'envole")

Hector: Si toutes les mères coupent l'index droit de leur fils, les armées de l'univers se feront la guerre sans index... Et si elles lui coupent la jambe droite, les armées seront unijambistes... Et si elles lui crèvent les yeux, les armées seront aveugles, mais il y aura des armées, et dans la mêlée elles se chercheront la gorge à tâtons...

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Andromaque: Et la guerre a sonné faux cette fois?

Hector: Pour quelle raison? Est-ce l'âge? Est-ce simplement cette fatigue du métier dont parfois l'ébéniste sur son pied de table se retrouve tout à coup saisi, qui un matin m'a accablé, au moment où, penché sur un adversaire, de mon âge j'allais l'achever.
Auparavant ceux que j'allais tuer me semblaient le contraire de moi-même. Cette fois j'étais agenouillé sur un miroir. Cette mort que j'allais donner, c'était un petit suicide. Je ne sais ce que fait l'ébéniste dans ce cas, s'il jette sa varlope, son vernis, ou s'il continue...
J'ai continué. Mais de cette minute, rien n'est demeuré de la résonance parfaite. La lance qui a glissé contre mon bouclier a soudain sonné faux, et le choc du tué contre la terre, et quelques heures plus tard, l'écroulement des palais. Et la guerre a d'ailleurs vu que j'avais compris. Et elle ne se gênait plus... Les cris des mourants sonnaient faux... J'en suis là.

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Andromaque: Ce sont les braves qui meurent à la guerre. Pour ne pas y être tué, il faut un grand hasard ou une grande habilité. Il faut avoir courbé la tête, ou s'être agenouillé au moins une fois devant le danger. Les soldats qui défilent sous les arcs de triomphe sont ceux qui ont déserté la mort.

Priam: Ma fille, la première lâcheté est la première ride d'un peuple.

Adromaque: Où est la pire lâcheté? Paraître lâche vis-à-vis des autres, et assurer la paix? Ou être lâche vis-à-vis de soi-même et provoquer la guerre?

Demokos: La lâcheté est de ne pas préférer à toute mort la mort pour son pays.

Andromaque: On meurt toujours pour son pays! Quand on a vécu en lui digne, actif et sage c'est pour lui qu'on meurt.

Acte II

La première partie de cet acte consiste en la difficile bataille pour convaincre Troie de fermer les portes de la guerre, suite à la fin du précédent conflit, et pour montrer les bonnes intentions troyennes quant aux diplomates grecs.

La seconde consiste en la réception des diplomates, et les négociations en elles-mêmes. J'ignore dans quel état d'esprit Giraudoux écrit cette pièce, mais mon regard voit vraiment dans l'entêtement d'Hector l'aveuglement français quant aux ambitions belliqueuses nazis. Hector subit affront après affront, encaisse les coups et se retrouve à tuer de ses mains un troyen pour éviter une guerre que ses adversaires déclencheront quoi qu'il advienne... tel les alliés cédant territoire après territoire au troisième reich.

Demokos: Les armées doivent partager les haines des civils

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Busiris: L'anéantissement d'une nation ne modifie en rien l’avantage de sa position morale.

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Hector: Jamais poète n'a interprété la nature aussi librement qu'un juriste la réalité.

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Hector: Un discours aux morts de la guerre c'est un plaidoyer hypocrite pour les vivants, une demande d’acquittement. Je ne suis pas assez sûr de mon innocence.

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Oiax: C'est de nature qu'il a une joue plus rouge que l'autre?

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Ulysse: Les autres grecs pensent que Troie est riche, ses entrepôts magnifiques, sa banlieue fertile. Ils pensent qu'ils sont à l'étroit sur du roc. L'or de vos temples, celui de vos blés et votre colza ont fait à chacun de nos navires un signe que l'on n'oublie pas. Il n'est pas très prudent d'avoir des dieux et des légumes trop dorés.