J'avais précédemment mieux noté cet assez sympathique roman - le souvenir m'en était plus vif. A le relire récemment, j'en ressors déçu, un peu. Pour une fois, la BD qui en a été tiré m'a semblé plus incisive que l'original.
Étrangement, le récit s'est mal soutenu de la première personne. Les atrocités guerrières, l'arbitraire militaire, l'absurde de la guerre ne bénéficient pas du point de vue du héros lui-même, que l'on sent à la fois embarqué malgré lui dans une aventure guerrière à laquelle il n'adhère pas, et étrangement passif au fil de cette aventure de quelques années en temps subjectif et de plus d'un millénaire en temps terrestre - les joies de la relativité générale :D. Observateur lucide et pudique, on ne sait pas grand chose de ses émotions - plus exactement, elles affectent peu son récit - et l'on n'est pas ému pour deux sous des choses parfois choquantes qu'il nous décrit - à rébours de ce qui se passe dans la BD.
Cela dit, reste une intéressante anticipation de l'avenir de l'humanité sur plus d'un millénaire. Le roman tresse en fait trois fil :
- une critique de l'armée et de la militarisation de la société ;
- la rencontre violente avec une race extra-terrestre, humanoïde à quelques détails près ;
- une vision accélérée de l'histoire de l'humanité.
C'est sans doute le troisième fil qui est le plus convainquant ou en tout cas, le plus stimulant. Il s'organise autour d'une réflexion sur la limitation des naissances - où l'homosexualité joue un rôle inattendu et, à mon sens, biologiquement irréaliste - et l'advenue d'un humain monoclonal a- ou poly-sexué, cela n'a plus d'importance.
Cela dit, Haldeman n'insiste pas trop, et le propos resterait donc assez anecdotique, n'était la tentative, intéressante en soi, d'épingler ici ou là les mécanismes de l'homophobie - le mot n'existait pas à l'époque de la rédaction du livre. Au fil de ses incursions dans le temps terrestre, le héros se retrouve plongé dans une société où, il y a peu, être hétérosexuel représentait une déviance. La critique en sous-main de Haldeman reprend des thèmes typiques de l'homophobie contemporaine (vannesterie pseudo-kantienne : si tout le monde était homo, l'espèce humaine disparaîtrait), en les inversant dans une anticipation du post-humain - on n'aurait pas dit es choses comme ça à l'époque non plus : cela ne pose pas de problème que tout le monde soit homo, vu que les hommes ne se reproduisent quasiment plus via les voies biologique - argument à double tranchant, on s'en doute, puisque l'homosexualité généralisée, pour autant quelle soit possible, est concomitante d'une modification progressive de l'humain.
Bref, ça m'a paru un gentil roman. Peut-être intéressant en son temps, dont je ne pense pas qu'il ait réellement vieilli en soi, sinon qu'on ait depuis écrit plus et mieux sur tous ces sujets. Du coup,je l'ai trouvé manquer soit de complexité, soit un tantinet d'âme.