Avant de me plonger dans ce roman jeunesse, j'ai cherché à me mettre en condition, c'est-à-dire que j'ai fait revenir à la surface de ma mémoire mes souvenirs les plus lointains du collège et du lycée, et bien que l'action de "La liste" ne se déroule pas en Europe mais aux Etats-Unis, et que, de ce fait, les repères culturels ne soient pas identiques, j'ai pensé que je ne pourrais pas apprécier ma lecture sans cela.
Force m'a été de constater que la majorité de mes souvenirs étaient douloureux ou rattachés à des moments d'angoisse, de crainte voire de réelle humiliation. Avec l'âge adulte, on guérit des doutes et des tâtonnements de l'adolescence jusqu'à presque en oublier la cruauté et pourtant... si je suis honnête avec moi même - et avec la satisfaction de savoir que cette étape de ma vie, pour difficile qu'elle fût, n'a jamais représenté un obstacle à mon épanouissement de femme -, je ne peux que constater qu'elle fut horrible à vivre, comme pour bien des adolescents.
Avec "La liste", nous pénétrons dans un établissement américain fréquenté par la middle class et dont l'une des traditions les plus officieuses est la diffusion, à la rentrée, d'une liste recensant les quatre plus belles et les quatre plus moches filles de l'année, chaque niveau ayant son canon et son laideron clairement identifiés aux yeux de tous, leurs noms écrits noir sur blanc sur ce bout de papier édité anonymement et placardé dans chaque couloir, sur chaque casier.
Par de courts chapitres au rythme bien enlevé, l'auteur nous propose donc huit portraits de jeunes femmes aux blessures diverses, qu'elles soient évidentes ou dissimulées. De ce point de vue, et bien qu'il faille s'accrocher au début pour s'y retrouver entre ces huit figures principales, j'ai trouvé ce roman intéressant. Ciblant plus particulièrement les lectrices adolescentes, ce roman permet de donner un éclairage nouveau sur des situations du quotidien de nos propres lycéennes.
Malgré les temps qui changent et les modes qui passent, on se rend hélas assez vite compte qu'il existe un socle commun à toutes les générations au moment de "l'âge ingrat", c'est cette poudrière que constituent les frustrations, les envies, les poussées d'hormones, l'excès dans les émotions, le besoin d'émancipation et... l'esprit de compétition. Ce dernier, si viscéralement présent dans la société américaine, transparaît parfaitement dans le récit. Dès le lycée, les élèves sont incités à élire une reine de beauté, creusant les fossés entre individus et générant une émulation moins saine que dans le contexte sportif.
Le culte de la beauté, qui se fait souvent au détriment de celui de l'intelligence, et qui stimule favorablement la recherche de la popularité est très bien retranscrit ici. Je craignais un peu en débutant ma lecture de me heurter à une jolie galerie de stéréotypes et, finalement, je me dis que les clichés, s'ils ont le cuir aussi dur, c'est qu'au final il reflète la triste réalité de notre société.
Une lecture à mettre entre les mains de toutes les jeunes filles - et des jeunes garçons - qui, j'en suis certaine, passeront un bon moment et feront évoluer leur perception de leurs propres expériences.