Contrairement aux autres opus de la saga qui se voient séparés de quelques décennies voire de millénaires, la maison des mères est la suite immédiate des hérétiques de Dune. Nous avions laissé Miles Teg sur Dune, après avoir développé des pouvoirs qui semblaient effrayer même les Honorées Matriarches. Ces dernières, ne supportant pas cette situation, avaient simplement vitrifié Dune, le bashar et ses troupes compris.
C'est donc dans une atmosphère de siège que l'on suit la vie du chapitre du Bene Gesserit. En effet, le vénérable ordre, acculé par les Honorées Matriarches, ne cesse de perdre des Révérendes Mères, acolytes et planètes devant les furies. Darwi Odrade, la Mère supérieure de l'ordre, compte beaucoup sur le dernier ghola de Duncan Idaho, sur Sheeana et sur un enfant ghola qui doit apporter de nouvelles options. Mais au sein du chapitre Odrade ne fait pas l'unanimité tant sa stratégie semble risquée. Et encore, ses sœurs ne devinent pas encore tout !
Frank Herbert démontre une fois encore l'étendue de sa vision. S'il n'a pu achever son cycle pour cause de décès, il livre là un nouveau tome captivant. Certes, le lecteur fasciné ne pourra manquer de relever quelques facilités auxquelles l'auteur ne nous avait pas habitué. La fin laisse un goût étrange mâtiné de perplexité. Mais doit-on attribuer celles-ci au fait que des révélations ultérieures auraient pu tout expliquer ? Difficile à affirmer tant sa pensée apparaît structurée. J'avais néanmoins conservé le souvenir d'une opus exceptionnel et cette troisième lecture me fait apparaître la maison des mères comme le moins abouti des tomes de la saga de Dune. Il n'en demeure pas moins un ouvrage de science-fiction de haute volée, tant le cycle est fabuleux.
A noter que l'édition de chez pocket de 1990 propose en postface un hommage poignant à celle qui fût sa muse et inspira sans doute le personnage de Jessica, l'épouse du duc Leto. Son trépas en 1984 laissa l'auteur certes triste mais en paix avec lui-même, tant cette femme semblait rayonnante et sage : Berverly, son "amie, épouse et collaboratrice", à qui Frank Herbert témoigne un amour d'une densité rare. Ce couple apparaît sans nul doute sous les traits des jardiniers qui apparaissent en vision à Duncan Idaho. C'est bien là une magnifique façon de conclure ce tome qui n'était manifestement le dernier de la saga. Un suaire enveloppe de mystère ce qui aurait pu être la conclusion du cycle.