Lordon entre dans le lard, dit-on.

Que ce livre m'a fait souffrir, alors. Devoir le fixer de l'oeil, la langue pendante ne s'expliquant pas nécessairement par cette chaleur, suite à un acte de consumériste cristallisant les tares de notre société, jusqu'au moment fatidique d'un départ en train, fut d'une insoutenabilité que même Ghandi refuserait de subir. Mais enfin, la Terre tournant entraînant de même les horloges, le moment crucial arrivé et je pu ouvrir, pas le Saint Graal, mais tout de même, une dissertation fort agréable sur la "Désunion européenne".


La surprise n'en fut pas vraiment une (j'avais, honteusement, jeté quelques regards distraits à quelques endroits du livre avant de réellement le prendre par le bon bout), ça se lit aussi facilement qu'est menée actuellement la destruction sociale en France. Nous retrouvons, pour les habitués du blog "La Pompe à phynance", le ton léger et bon vivant du personnage, dont il est juste regrettable de voir une frilosité dans l'utilisation de métaphores dont pourtant il nous avait habitué.


Mais enfin, ça se lit, même à moitié assommé, et c'est bien là le principal.


La forme étant d'une clarté limpide, le fond s'apprécie d'autant qu'il est d'une densité que renieraient pas les puddings de grand-mère.


Et là, Frédéric nous offre un véritable festival: histoire d'une Allemagne souffrant de sa propre hégémonie dont ils ne veulent pas, mis au ban de la politique (l'ordolibéralisme) qu'ils imposent à tout le monde, moqueries sur les européistes béats, internationalistes benêts, il répond à toute les objections et, c'est bien ce qui fait sa force aussi, propose des solutions. On aurait pu se passer de formules mathématiques (loin d'être complexes non plus hein), mais de toutes les façons personne ne vous force à tout lire et cela ne représente qu'une toute partie du livre.


Le bonhomme est plutôt de bonne humeur, et nous la fait partager de bout en bout, avec, notamment, mon passage chouchou, en l'occurrence le chapitre sur le défaut. Un vrai régal, rien qu'à imaginer les têtes des Hollande, Valls, Macron, Christine Lagarde et autres zombies de la finance devant une telle proposition. Après tout, ne dit-on pas que les capitalistes vendront la corde pour les pendre ? Alors très certainement qu'ils vendront aussi le rasoir pour faire table rase.


Allez, on peut regretter que ce livre n'est pas totalement dépendant du blog "La Pompe à phynance", et même si c'est pour des sujets, il est vrai aussi, fondamentaux, notamment la reprise de l'article "Ce que le FN ne nous prendra pas". Nous sommes en plein dans le sujet de la souveraineté, alors pourquoi pas. Enfin, ce livre ressemble à une conférence plus qu'à un essai vraiment structuré. C'est éminemment pardonnable, vu sa lisibilité. Mais on saisit mieux le fond lorsque Lordon défend ses positions avec sa voix plutôt que sous cette forme un peu bâtarde. Voir le débat Picketty/Lordon dans Ce Soir Ou Jamais (Sorman assommant son auditoire avec ses bêtises, autant l'ignorer et en profiter pour aller aux toilettes, vous évacuerez en même temps que vous ingurgiterez) pour se faire une idée un peu plus précise du personnage.


Un très bon bouquin donc, parlant d'un sujet essentiel (la souveraineté), répondant aux enjeux soulevés comme il se doit. Mais dont la forme un peu bâtarde - entre l'essai, la réflexion philosophique (dont je ne nie pas l'importance), le blog et la conférence représente quand même un obstacle pas forcément évident pour le lecteur lambda.

Bung
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le 9 juil. 2015

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Bung

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