La Mécanique du cœur par Julie_D
Une machine romanesque pleine de potentiel mais grippée par trop d'influences et de parasites à l'imagination. Mathias Malzieu ne parvient pas ici à créer son univers propre, car trop emprunteur.
Son admiration pas le moins du monde dissimulée pour Tim Burton ou Lewis Caroll dessert le livre : le sentiment de déjà-vu pèse énormément sur la lecture et transforme La mécanique du cœur en un assemblages de rouages piqués à droite à gauche chez d'autres conteurs bien connus. Et ce, du décorum (on pense au Freaks de Browning) aux situations (Edward aux mains d'argent) en passant par les personnages : une fois que Jack quitte Edimbourg et les premiers protagonistes de l'histoire, la moitié des personnages qu'il va rencontrer ne sont même pas des inventions.
Alors, peut-être conscient de cette faiblesse au sein de sa mécanique, Malzieu trouve une façon alternative d'imprégner son livre de lui-même, de sa personnalité : son groupe de rock a sorti dans le même temps la BO du bouquin. Pas de chance, elle renforce l'effet expliqué ci dessus et contribue à faire écran à la capacité d'imagination du lecteur. J'ai personnellement un peu de mal avec la musique franglaise et un rien hystérique de Dinonysos mais je pense objectivement que le problème n'est pas là. Certaines chansons m'ont beaucoup plues, faites rire ou touchée mais j'ai nettement plus apprécié ma première lecture du bouquin, antérieure à l'écoute. Car après s'être passé le CD, impossible de rouvrir le roman sans voir les bobines de Malzieu et Olivia Ruiz sur Jack et Miss Acacia, toutes les voix et même les notes nous sont imposées .
En revanche, là on retrouve plaisamment la patte de Malzieu, c'est dans la stylistique. Son amour des mots ici au service d'une histoire "originale" est souvent joyeusement communicatif. Inégal cependant : les sublimes paragraphes d'ouverture font peu à peu place à des tournures un peu plate, et certaines 'audaces' apparaissent comme des 'trucs' voire des trucages, ceux-là même dont cherche à se débarrasser le héros.
Ultime déception : tout ça tombe un peu à plat : si la fin est scénaristiquement intéressante, les derniers mots laissent en fait le lecteur sur sa faim, comme si l'auteur avait juste noté que le nombre de signes de son bouquin avait atteint le seuil du "publiable" et s'était arrêté là.