Simon Leys, éminent sinologue belge, est surtout connu pour avoir été l'un des premiers intellectuels occidentaux à dénoncer les excès du maoïsme au début des années 70. En 1986, il publie son unique roman : "La mort de Napoléon". Aujourd'hui quelque peu oubliée, cette courte œuvre d'une petite centaine de pages est rééditée dans une collection vouée à mettre en valeur le patrimoine littéraire belge francophone.


Le Napoléon que nous propose Simon Leys est assez éloigné de l'image glorieuse du vainqueur d'Austerlitz, c'est le moins que l'on puisse dire. Évadé de Sainte-Hélène après avoir laissé sa place à un sosie, l'Empereur déchu est un personnage falot, vieillissant, au physique ingrat. Devenu anti-héros après avoir été héros, c'est un homme écrasé par l'ombre envahissante de celui qu'il fut, alors que sa légende ne cesse de prendre de l'ampleur depuis sa défaite finale... En témoigne par exemple le savoureux épisode de sa visite, à la suite de quelques péripéties, du champ de bataille de Waterloo : six ans après le carnage, le voilà déjà transformé en parc d'attraction pour Anglais fortunés, chaque hôtel prétendant abriter la véritable chambre à coucher de l'Empereur. Et si quelques rares fidèles parviennent encore à reconnaître Napoléon Bonaparte dans celui qui se fait désormais appeler Eugène Lenormand, on ne retrouve les accents de l'épopée que lorsqu'il s'agit de conquérir de haute lutte... le marché parisien du melon et de la pastèque !


J'ai apprécié ce roman qui m'aura permis de souffler un peu, l'espace de deux petites heures, entre d'autres lectures napoléoniennes plus "dures" sur les massacres des campagnes de Russie ou d'Espagne. En réalité "La mort de Napoléon" s'apparente moins à un roman en bonne et due forme qu'à un conte, car sous la légèreté apparente on devine un propos sérieux, notamment sur la politique et l'exercice du pouvoir. À noter que la postface, une fois n'est pas coutume, remplit parfaitement son rôle, offrant des pistes de réflexion intéressantes sans prétendre tout expliquer au lecteur.

Oliboile
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le 23 févr. 2020

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