Une biographie fictive du commandant d'Auschwitz, mais écrite à partir de ses propres mémoires et du résumé des entretiens qu'un psychologues a eu avec lui en prison. Contrairement aux Bienveillantes de Jonathan Littell dont le narrateur était aussi un Nazi au premier plan de la solution finale (mais totalement fictif celui-ci), la majeure partie du livre se passe avant la Seconde Guerre mondiale. L'enfance auprès d'un père pasteur extrêmement strict (on pense au Ruban Blanc de Haneke), la barbarie absurde des combats de la Première Guerre mondiale (ici en Turquie), la misère et la famine en Allemagne après la guerre, puis les débuts dans le parti nazi qui se fait une spécialité de séduire les anciens combattants, les passages à tabac et assassinats de syndicalistes et de communistes, puis finalement la guerre de 39-45 et Auschwitz. Sans faire de raccourcis faciles, Robert Merle montre les dangers de l'obéissance aveugle et du sens du devoir quand il est mis au service d'un projet meurtrier. Rudolf Lang (alter-ego de Rudolf Höss donc) est carrément pris de vertiges terrifiant dès lors que son quotidien n'est pas réglé comme du papier à musique. Il lui faut en permanence des ordres à obéir, ce qui aboutit à son perfectionnement du rendement des chambres à gaz et des fours crématoires. Aussi brillant qu'éprouvant.