L'analyse esthétique de Nietzsche sur la tragédie grecque, à laquelle il donne une origine, à savoir Dionysos et Apollon, qui représentent deux pulsions artistiques différentes mais complémentaires. Pour faire simple, Apollon représente les formes et la plastique, et Dionysos, le chaos et la transe, l'ivresse, comme celle obtenue après ingestion d'une boisson narcotique, comme il le dit. C'est opposition entre ces forces créatrices qui donne la tragédie grecque, à la fois codifiée et soumise aux pulsions de l'ivresse inhérente au processus créative. L'académique et la créativité.


Eschyle et Sophocle réunissaient ces deux forces dans leurs tragédies. Le Dionysiaque, c'est présences des satyres, créatures hybrides réunies en chœurs pour exciter la foule par leur comportement aux portes de la mort et de la normalité, la faire entrer en transe, l'Apollonien, c'est la beauté formelle de leurs vers.


Puis Euripide est arrivé, il a réduit l'importance des chœurs et a ôté le Dionysiaque à la tragédie grecque, ne faisant plus que de l'Apollinien, de la plastique. Les pièces d'Euripide sont moins en proie à la folie, à l'irréel, au chaos, et Nietzsche, ça ne lui plaît pas ! En ôtant le dionysiaque, Euripide a contribué à la mort de la tragédie antique.


Puis Socrate est arrivé et a achevé le lyrisme. Socrate, il a fait S, il ne jure que par la raison, et il exhorte l'homme à repousser tout irrationalisme pour parvenir à la vérité. Pas de place pour les excentricités. Le Dionysiaque est anéanti, et l'art, dans sa substance, avec. Socrate s'en félicite, car l'art ne représente pas la vérité pour lui, donc toute pratique artistique est à bannir.


L'art n'est pourtant pas si mort ! Nietzsche compte sur Wagner et son opéra, l'art total, pour réconcilier le spectateur avec sa fibre dionysiaque, que l'on peut retrouver dans sa musique grandiose et féconde. La musique est le catalyseur de la métaphysique de l'art, et c'est le point d'optimisme soulevé par Nietzsche, qui déplore que les hommes, privés de Dionysiaque à cause d'Euripide et Socrate, soient tous devenus des élèves qui choisissent de faire S après le troisième.


Avec le recul, le philosophe a critiqué cette œuvre, qu'il jugeait trop peu pertinente sur certains passages. Mais son envie de renouer avec le chaos primaire est bel est bien intact, et, ce chaos, j'y pense à chaque fois qu'une musique me met en transe par l'émotion inénarrable qu'elle me procure (merci Manowar), donc, si l'on se fie à mon avis, ce qui n'est rien, on peut dire qu'il avait raison!

Ubuesque_jarapaf
7

Créée

le 9 févr. 2023

Modifiée

le 9 févr. 2023

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