La Naissance du jour
6.7
La Naissance du jour

livre de Colette (1928)

Dans ce roman autobiographique de 1928, Colette, que quitte la fleur de l’âge, s’épanche sur tout ce que lui suggèrent de réflexions, de sentiments, d’impressions, de retour à la mère, ce passage et cette transition, tandis qu’un beau jeune homme, Vial, s’éprend d’elle.
Pendant que l’été s’épanouit et se répand en rayons d’or sur un fond inlassablement azuré, Colette séjourne paisiblement dans sa maison du sud de la France, au milieu des « siens », ses bêtes dont l’attachement réciproque parcourt toute l’œuvre de l’autrice, seuls êtres dont la présence n’est jamais une offense. Cette demeure est-elle la dernière ? L’ordinaire qui la caractérise, la simplicité à laquelle elle enjoint, la solitude qu’elle délimite, marquent-ils l’éclosion finale ? Colette, si elle vit désormais seule, ne vit pas délaissée. D’une part, intérieurement, elle se nourrit abondamment d’un présent qui confronte les orages sentimentaux du passé à la promesse d’une sérénité qui, tel un éclairci, les estompent, les relèguent. D’autre part, et au bénéfice de l’âge, elle s’est choisi une poignée d’ami(e)s qu’elle a plaisir à recevoir. De toute une vie d’amour, la conclusion de ce présent est univoque : l’amour est une « banalité » appelée à se retirer tel un ressac dont l’âge est l’obstacle.
En quoi est-ce une banalité ? Sans doute en ce qu’il est un commun de heurts, d’intrigues, de trahisons ; bref, de soucis. Or Colette a décidé, – le ressac de l’amour nécessite avant tout un moteur intentionnel – que l’amour désormais ne serait plus Son souci. Aussi veut-elle rapidement éclaircir la situation avec Vial afin que ne subsiste nulle ambiguïté. Elle y parvient, mais la réalisation de son dessein n’est pas sans l’interroger, voire même la troubler. Fidèle à son choix d’indépendance à l’égard de l’intrigue amoureuse dans la mise à l’épreuve qu’a apportée Vial, elle a en effet pu vérifier la ténacité d’une sorte de réflexe de l’amour sous l’amère forme du regret. Une faiblesse qui, en dernière analyse, montre que le Jour ne naît pas sans les auspices de la conquête.

Kevin-1677
7
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le 11 nov. 2021

Critique lue 134 fois

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