Souvenirs d’avenir
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Quoi de mieux pour s'initier à Jack London qu'un roman d'anticipation ? Pour le fan de SF que je suis, honnêtement je ne vois pas. En 2073, Howard Smith raconte à ses petits enfants ce qui mit fin à l'Humanité en 2013 : la Peste Ecarlate. En l'espace de quelques semaines, il ne restait plus que quelques êtres humains à la surface du globe. Howard Smith était l'un d'eux. Il vit alors la nature reprendre ses droits et effacer toutes traces de la civilisation. Les animaux domestiques redevinrent sauvages. Tout comme les rares hommes qui survécurent à la pandémie...
Et oui, dès le début du roman on comprend que l'an 2073 n'a rien à voir avec celui d'oeuvres de SF pure. On prend rapidement conscience que les petits enfants du narrateur, Howard Smith donc, sont de petits sauvageons sans manière et utilisant un langage limité et primaire. C'est pourquoi ils ne comprennent pas leur grand-père qui utilise des mots qui leur sont inconnus. Qui leur parle de choses qu'ils ne connaissent pas. De concepts qu'ils ne peuvent espérer ne serait-ce que toucher du doigt. Bref, comme beaucoup de jeunes, ils regardent leur aïeul en se disant que le pauv' vieux n'en finit plus de perdre la tête et de radoter....
Mais qu'importe ! Pour nous, lecteurs, c'est un réel plaisir de découvrir les prémices de la maladie jusqu'à l’inexorable régression de l'espèce humaine. Comme avancé en introduction de ce billet, je ne connais pas (encore) bien Jack London mais je sais qu'il est apprécié pour sa relation à la nature et les descriptions dépaysantes qu'il en tire et autant dire que sa réputation n'est pas surfaite. Le style est simple mais percutant. On voit d'ailleurs que l'auteur maîtrise plus la descriptions d'ours ou de loups sauvages que d'univers futuristes.
Loin de moi l'idée de me moquer mais parler de l'an 2013 comme une période faste pour l'aviation avec un ciel envahi de....dirigeables, ça a quoi de faire sourire lorsqu'on compte Philip K. Dick comme l'un de ses auteurs fétiches. Mais qu'à cela ne tienne, il faut tout de même saluer l'effort puisque le roman date de 1913 et quand on se rappelle que les films/romans de SF des années 60/70 annonçaient des voitures volantes pour le début du XXIe siècle, on peut se dire que l'erreur est humaine.
D'ailleurs, humain le livre l'est à plus d'un titre et c'est même là que réside sa plus grande force. Jack London se sert du contexte social de son époque - soit la fin de XIXe, début XXe siècle - pour l'extrapoler cent ans plus tard et là aussi, si on fait fi de certains anachronismes comme la pratique répandue des gouvernantes, force est de constater qu'il vise juste et arrive à donner un écho contemporain à son récit. Honnêtement, si aujourd'hui une pandémie comme la Peste Ecarlate se déclarait, l'anticipation décrite dans l'ouvrage se rapprocherait de ce qu'on vivrait.
Concrètement ce serait l'anarchie. La culture, aux sens noble et large du terme, disparaîtrait. Les plus bas instincts de l'être humain referaient surface car plus bridés ni étouffés par la pression et les conventions sociales. Les classes défavorisées se révolteraient et renverseraient l'échiquier social. Tout cela, Jack London le décrit et l'anticipe avec brio. Et c'est pourquoi le livre est selon moi réussi. Bien qu'il se fourvoie sur la forme futuriste, il nous éclabousse de clairvoyance au niveau du fond social et humain. Ce n'est pas révolutionnaire en soi mais la date de parution de l'ouvrage force le respect.
En conclusion, La Peste Ecarlate est un roman d'anticipation qui vaut le coup d'oeil car non seulement il se lit vite (comptez deux grosses heures de lecture) mais surtout il est toujours d'actualité. Et ça c'est brillant. C'est effrayant aussi. Mais c'est brillant quand même !
Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à sa liste Lectures 2015 - L'année où Sir Terry Pratchett a tiré sa révérence.
Créée
le 30 sept. 2015
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