Déjà, La Porte m’a rebuté par un style essentiellement narratif où Magda Szabó utilise vraiment le dialogue pour des confrontations bien senties entre Émerence et elle-même.Quelque part, l’écrivaine pêche aussi quelque peu dans une extension du domaine de la digression. La galerie de personnages et les événements décrits ne parviennent pas à faire décoller un récit sans surprises. La Porte, qu’on pourrait classer à la limite de l’auto fiction, s’embourbe dans la chronique ordinaire, alors que le livre avait le potentiel pour intéresser plus dans ses recoins. Ce sont d’ailleurs ces derniers, au delà de la relation entre Magda et Émerence (véritablement impossible de part leurs milieux respectifs et leurs systèmes de valeurs) qui m’ont le plus intéressé. L’objet à proprement dit de la porte ( ne donnant pas son titre au livre par hasard) revêt un symbolisme incroyable pour la domestique.C’est un paravent protégeant sa sphère privée et ce qu’elle se défend de montrer à autrui.Quelque part, Émerence, en se projetant dans la vie publique et le quotidien des autres, occulte les déceptions de sa vie et réfute toute exposition prolongée. Ses réactions envers Magda Szabó ( quand elle se couvre d’un voile pour ne pas la voir ou lui parler à l’hôpital par exemple) prouvent aussi que la domestique s’approprie « des objets porte » pour signifier « vous avez dépassé les limites des relations que je souhaite avoir avec vous ».Un comportement singulier autant que celui qu’elle entretient avec le chien Viola.Entre symbiose et éclats de violence, Émerence imprime encore des limites démentes et impose sa loi à l’animal. Celui-ci les accepte car l’autorité de ses maîtres n’est pas véritablement incarnée comme semble le suggérer l’écrivaine.Et au delà des failles et des blocages d’Émerence, il y a ces raisons contrariées où le rationnel prend la tangente. C’est ce contre-pied permanent de la domestique aux événements et aux gens qui m’a stupéfié à la lecture de la Porte et m’a incité à terminer le livre. Les derniers chapitres ne m’ont pas plus avancé que cette femme demeure une énigme car entre son apparent contrôle et ses lâcher-prises, il n’y a pas de juste milieu. Je suis vraiment dérouté par ce livre mais avoue qu’il ne laisse pas indifférent et soulève bien des questions.C’est là son moindre défaut.