A la fin du XIXe siècle, Vladimir Soloviev, philosophe russe, publia un livre qui allait changer la face de son pays et de l'Eglise : La Russie et l'Eglise universelle. Ecrit en langue française (que Soloviev maitrisait parfaitement), ce livre est un plaidoyer pour l'indépendance de l'Eglise orthodoxe russe à l'égard de l'Empire et pour la réunion avec la Papauté.
Le style de Soloviev est très baroque. Il survole délibérément tout un tas de détails pour ne pas noyer son lecteur sous les informations. Son analyse est succincte, mais juste et pénétrante, à l'exception de quelques détails un peu datés, notamment sur les pères de l'Eglise.
Cet éloge du pape par un orthodoxe garde aujourd'hui toute sa pertinence. A l'heure où l'Eglise orthodoxe russe n'est guère autre chose qu'un instrument entre les mains d'un dictateur (ce qu'elle n'a hélas jamais cessé d'être depuis Ivan le terrible pourrait-on penser), il devient même une lecture indispensable, un ouvrage œcuménique avant l'heure, écrit par un auteur qui tout en professant ouvertement la foi catholique, n'a jamais renié son appartenance à son Eglise, proposant ainsi un modèle d'unité dans la communion et l'obéissance filiale au lieu de l'absorption pensée par la plupart des auteurs catholiques à cette époque.
Monument de la littérature russe aussi bien que française, chef d'œuvre où l'âme de Pouchkine rayonne sous la langue de Pascal, pierre fondatrice de l'œcuménisme, profession de foi dans le ministère du successeur des Apôtres, appel à l'unité des chrétiens, La Russie et l'Eglise universelle est un incontournable pour tous les hommes de bonne volonté.