Un conte au temps du Christ. Et un film pour tous les temps.

Ben-Hur ! Monument du péplum, vainqueur de onze oscars (à égalité avec Titanic et Le Retour du Roi et encore, en 1959, il y avait moins de catégories), considéré comme l'un des plus grands films de l'Histoire du Cinéma, manquait à ma liste de critiques. Peut-être avez-vous remarqué, si vous me suivez depuis quelque temps, que cette critique est la trente-troisième. Non, ce n'est pas un parallèle christique, qu'allez-vous penser ? Mais quelle meilleure occasion que celle-ci pour parler de ce film que j'apprécie tant ?


Je ne reviens pas sur le scénario du film, il est connu de tous ; c'est d'ailleurs un point sur lequel on peut critiquer le film : son scénario est simple. Cependant, simple ne veut pas dire stupide, et c'est justement la simplicité du film qui en fait un grand chef d'oeuvre : c'est simple et percutant, er cela permet d'approfondir toute le message du film. L'histoire de ce prince juif condamné aux galères est mise en parallèle avec celle de l'un des personnages les plus fascinants qui aie jamais vécus : Jésus. Fascinant en effet, parce que cet homme est également considéré par la religion chrétienne comme le Fils de Dieu, envoyé sur Terre pour sauver l'humanité du péché. Or, Ben-Hur est et fait exactement l'inverse.


Certes, tout comme Jésus, il est issu du peuple juif et il est injustement condamné (bien que Jésus soit issu d'une famille d'artisans et Ben-Hur, de l'aristocratie) ; mais c'est justement dans leurs attitudes différentes que ces deux hommes vont se distinguer : l'un d'entre eux va se soumettre à cette condamnation injuste pour sauver les hommes, et donner sa vie pour cela ; l'autre va survivre grâce à sa haine et vouloir combattre et tuer le responsable de sa condamnation ; c'est d'autant plus intéressant que Jésus, accepte de souffrir à la place des hommes, coupables de leurs péchés, alors que Ben-Hur veut tuer l'homme qu'il pense être responsable de la mort de sa mère et de sa sœur, alors qu'il n'en est rien.


Par ailleurs, je trouve très parlante la décision de William Wyler de ne pas montrer son visage : en effet, ainsi, cela donne une sorte de dimension indescriptible à Jésus, comme si Jésus n'était pas visible aux yeux de tous (ce qui est le cas aujourd'hui, à supposer que Jésus soit Dieu, personne ne l'a vu, mis à part certains de ses contemporains). Cela donne un aspect sacré au Christ, ce qui renforce la divinité du personnage (dans le film entendons-nous bien).


À partir d'ici, une petite précision s'impose : je parle en termes religieux et on pourrait me le reprocher, à moi comme au film. Sauf que le film traite de thèmes religieux ! Il s'agit d'un film sur des caractéristiques fondamentales de la religion chrétienne ! On ne peut donc pas faire comme si cet aspect était mineur, car il ne l'est pas, cela reviendrait à parler de Star Wars en ignorant sa dimension « Space Opera ». On peut ne pas aimer un film à cause de cela, mais je trouve un peu facile de critiquer un film juste parce qu'il est « chrétien », et ce, quand bien même il serait parfaitement réalisé.


Et ce film EST parfaitement réalisé. Trois scènes le montrent : d'abord cette extraordinaire bataille navale entre les romains et les pirates macédoniens, totalement extraordinaire de par son ampleur et les moyens déployés. Ensuite, la fameuse course de char entre Messala et Ben-Hur (qui prit à elle seule plus de deux mois de tournage, rien que ça), révolutionnaire et culte. Et enfin, la passion du Christ. Je ne peux pas faire de commentaires sur cette scène, il suffit de la voir. Les décors sont somptueux, les plans, magnifiques, le film a beau durer trois heures et demie, il n'ennuie jamais, au contraire.


D'autre part, la musique du film est excellente, épique avec un petit côté mystique parfaitement adapté à cette histoire. Elle exprime à la fois la dimension spectaculaire du film, mais aussi l'intimisme de certaines scènes du film.


En fait, le seul problème que j'ai avec ce film, c'est le format de l'image : je le trouve trop petit, plus que le Cinémascope, ce qui gène la sensation d'ampleur que l'on devrait avoir en regardant le film. Mais le scénario, l'action, les décors et les personnages font rapidement oublier ce détail.


Parlons donc des personnages : Ben-Hur est génial de charisme et de détermination. Il ne survit que par la haine qu'il éprouve vis-à-vis de Messala, et ne trouve la paix qu'après la guérison de sa mère et de sa sœur et non par la mort de Messala. Charlton Heston, récompensé par un oscar du meilleur acteur pour ce film, est exceptionnel, tour à tour touchant, charismatique et détestable. Voici d'ailleurs une seule raison pour laquelle il faut aller voir ce film si vous êtes dubitatifs : voir Charlton Heston roter devant la caméra ! C'est stupide, je sais, mais c'est drôle.


Pour l'anecdote, il écrivit une lettre d'éloge au comédien qui le double en français, Jean-Claude Michel, pour le remercier de son travail de doublage pour Ben-Hur ; cette seule phrase devrait convaincre les détracteurs du doublage que redoubler un film n'est pas forcément synonyme de mauvais travail :



 Si les Français aiment ce que j'ai fait dans ce film, c'est vous que
je dois remercier.



Les autres personnages sont tous excellents, en particulier Esther (Haya Harareet), Messala (Stephen Boyd récompensé d'un Golden Globe) et surtout le cheikh Ilderim (Hugh Griffith, qui repartira un oscar du meilleur acteur dans un second rôle en poche, plus que mérité).


Ce film est génial et n'a volé aucun de ses onze oscars. Il est représentatif d'une époque fameuse de l'Histoire du cinéma : une époque où l'on faisait des films ambitieux et superbes, un temps où grand spectacle rimait avec intelligence et profondeur ; un moment de l'Histoire qui trouva sa fin avec un autre grand péplum, La Chute de l'Empire Romain. Je ne dis pas que ce n'est plus le cas aujourd'hui, beaucoup d'exemples prouveraient le contraire de cette thèse (Le Seigneur des Anneaux par exemple...) ; mais il faut reconnaître que beaucoup de blockbusters actuels misant tout sur les effets spéciaux en images de synthèse devraient prendre exemple sur Ben-Hur. Mais aujourd'hui, l'action a remplacé l'épique, et c'est parfois dommage.


Ce film a servi d'exemple à de nombreux autres films. Je n'en citerai que deux : Star Wars : La Menace Fantôme (avec la fameuse scène de la course de pod racer, un superbe hommage, dans un film très sous-estimé à mon goût) et surtout Gladiator, pour l'histoire de vengeance. Je préfère d'ailleurs Ben-Hur à Gladiator, je trouve à Ben-Hur une dimension intemporelle et un message profond que Gladiator a du mal à montrer (il montre ces dimensions par ailleurs, mais pas de la même façon).


Je n'ai rien d'autre à dire sur ce film, à part qu'il est aussi un modèle d'adaptation (car Ben-Hur est à la base un roman) et un remake génial (un premier film Ben-Hur date de 1925). tout le monde a déjà parlé de Ben-Hur, donc je n'ai rien à ajouter sinon : allez le voir.

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le 6 mars 2015

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