Un livre sur un homme dont Sarkozy ne savait pas prononcer le nom

Premièrement, il y a un plaisir manifeste à replonger dans cet âge d'or de l'intelligentsia française. Si nul ne fut prophète en son université, forçant donc à migrer au Collège de France, il s'installe une nostalgie réelle ou fantasmée - en lisant ce livre en 2015 - à penser à cette période où ces intellectuels étaient ceux qui étaient écoutés, lus, commentés. En démarrant son livre à l'accident de Barthes (prononcez Bartaisse si comme Sarkozy vous méprisez les intellectuels), Laurent Binet saisit également le moment où cette émulation intellectuelle commence son déclin. Après Barthes ce sera Lacan, puis Foucault, Deleuze qui mourront dans les années suivantes, nous laissant seuls avec BHL.


L'amour de Binet pour ces gens - et le monde universitaire en général - est joyeusement palpable au travers de l'humour décapant rendant ainsi tant hommage qu'une critique juste.


Puis, passée la première partie du livre, viennent doutes. Le style ne semble pas à la hauteur, les situations se répètent avec de grosses ficelles, les personnages s'enfoncent dans les caricatures... Mais faut-il y voir les faiblesses du livre ou sa force ? En effet, l'objectif n'est-il pas en les exagérant de faire ressortir les caractéristiques et de tourner en dérision le polar et ainsi de copier le fonctionnement de la science sémiologique ? Barthes disait d'ailleurs dans Mythologies qu'il avait recours à l'exagération pour mettre en évidence les lignes de forces des représentation symboliques des signes.


De la même façon se pose la question du format, avec un humour qui peut sembler trop millimétré dans sa récurrence dans le texte, un récit qui s'étire et un cheminement trop classique. Bref, se jouer des codes du polar devait-il se faire par un roman ? Peut-être pas mais le roman n'est-il pas le format obligatoire pour rendre hommage à Barthes ?

EdouardLaforgu
7
Écrit par

Créée

le 8 nov. 2015

Critique lue 423 fois

1 j'aime

Epsilon Lambda

Écrit par

Critique lue 423 fois

1

D'autres avis sur La Septième Fonction du langage

La Septième Fonction du langage
Nadouch03
4

Plongée dans un fouillis politico-linguistique...

Ah qu'il est difficile de noter et critiquer ce roman ! Presque aussi difficile qu'il m'a été de le finir ! Car, si je me suis délectée du premier tiers, au bout d'un moment je me suis lassée des...

le 19 oct. 2015

9 j'aime

La Septième Fonction du langage
AntonJørgen
3

Brice de Nice au pays des sémiologues

Cela commence pourtant si bien. De l'intrigue. Un meurtre. Une brute assumée de policier qui doit se coltiner toute l'intelligentsia parisienne, verbeuse et délirante, pour mener son enquête. Des...

le 7 nov. 2016

8 j'aime

1

Du même critique

Anorexie et Désir Mimétique
EdouardLaforgu
2

Critique de Anorexie et Désir Mimétique par Epsilon Lambda

S'il y a quelques idées bonnes comme le concept de victime sacrificielle, le reste est assez indigeste. Girard entend aller là où Freud a calé, faire du Freud mieux que Freud... pas de chance ! avec...

le 27 oct. 2012

4 j'aime

2

Wrong
EdouardLaforgu
7

Critique de Wrong par Epsilon Lambda

Il y a des choses mysterieuses. Pourquoi la plupart des gens trouvent que Gad Elmaleh avec ses sketchs sur les téléphones portables est un mec drôle ? Pourquoi Georges Brassens est-il plus respecté...

le 28 oct. 2012

3 j'aime

1

La Septième Fonction du langage
EdouardLaforgu
7

Un livre sur un homme dont Sarkozy ne savait pas prononcer le nom

Premièrement, il y a un plaisir manifeste à replonger dans cet âge d'or de l'intelligentsia française. Si nul ne fut prophète en son université, forçant donc à migrer au Collège de France, il...

le 8 nov. 2015

1 j'aime