La Terre par LeChiendeSinope
Selon Zola, La Terre devait être aux paysans ce que Germinal a été aux ouvriers. C'est assez râté. Car ici, à première vue, point de respect pour le paysan, qui est décrit comme une brute cruelle, égoïste, jalouse, païenne, en somme une bête primitive pour qui seul l'appât du gain, symbolisé par la possession de la terre, importe.
La Terre est sans doute le roman le plus atroce et le plus cruel de Zola, c'est dit. Il m'est parfois arrivé de vouloir détourner les yeux. La trame principale est pourtant des plus simples : c'est celle de l'héritage d'un vieux couple, qui va mettre à mal les relations de leurs trois enfants. Autour d'eux gravitent aussi une dizaine de personnages, tous habitants le petit village de la Beauce.
Le moins que l'on puisse dire, c'est que les personnages sont hauts en couleur. C'est l'une des forces du roman. Ils sont drôles, bêtes, naïfs, méchants. Malgré leur cruauté, on peine à leur en vouloir. Leurs pensées, leurs actes sont particulièrement bien décrits par Zola, dont l'art excelle ici. Son don incroyable pour décrire les scènes et les comportements des personnages fait ici des merveilles. C'est une chose assez difficile à expliquer mais ce roman est vivant, et on a l'impression de vivre nous aussi à côté de ces personnages.
Zola s'inscrit aussi dans une démarche réaliste, insérant son roman dans les problématiques inhérentes à l'agriculture de l'époque, en pleine deuxième révolution industrielle, qui verra l'apparition de la mécanisation et de la chimie dans les cultures, mais aussi les préoccupations liés à l'importation de blé à bas prix venue des Etats-Unis.
Cela me peine de voir ainsi traité le paysan par Zola. Mais son roman est tellement excellent, et traversé par tout un tas de scènes fulgurantes, que j'en oublie cette vision un peu caricaturale.
Loin d'être chiant comme on peut l'entendre, à lire à tout prix pour qui aime l'auteur. Les autres peuvent bien aller se faire enculer.