Pour moi, dès que je sais que Jean-Christophe Grangé sort un livre, il m'est impossible de résister et de ne pas acheter son roman. Il reste plus ou moins longtemps sur mes étagères, mais je sais qu'il est là et quand mon envie de plonger dans les ténèbres des âmes et de la vie me prend, je le sors. Car j'ai connu les thrillers à travers cet auteur, et j'ai tous ses livres. J'en aime certains plus que d'autres, mais c'est sans aucun doute une valeur sûre. Meurtres ignobles, personnages torturés, intrigues bien ficelées, l'auteur sait toujours se renouveler et inventer des histoires avec lesquelles vous aurez du mal à vous endormir. Frissons garantis.


Dans cet avant dernier roman à ce jour (et oui, j'espère qu'il y en aura encore beaucoup d'autres), nous nous immergeons pleinement ou presque dans la face cachée du milieu sadomasochiste parisien. Oublier la candeur horripilante de 50 nuances de Grey, ici on est dans la vraie vie, celle qui fait mal, celle de l'abjecte soumission, celle où les personnes qui pratiquent, recherchent la douleur intense pour se procurer du plaisir. Pour ceux qui n'ont pas peur, certaines scarifications corporelles sont explicitement décrites pouvant mettre mal à l'aise : mutilations des parties intimes avec lames de rasoir et j'en passe, je vous laisse les découvrir si vous le souhaitez. Jean-Christophe Grangé avait déjà exploité ce thème à travers Lontano, ici on frôle la psychologie des personnes pratiquantes. J'ai trouvé malheureusement que quitte à être immergé dans cet univers, il aurait justement fallu creuser beaucoup plus dans l'esprit des personnages, ici Jean-Christophe Grangé, reste, pour ma part, beaucoup trop à la surface et ne fait que décrire certaines pratiques qui sont en libre accès sur google pour ceux qui osent écrire sadomasochisme, bondage ou shibari dans la barre de recherche. Il nous propose de rencontrer certaines personnes qui connaissent bien ces pratiques mais jamais l'explication du pourquoi et comment ils le font, n'est réellement évoqué, ça a au moins l'avantage de ne pas juger ces personnes, ce monde obscur : pas de bien ou de mal, juste des faits.


En revanche, j'ai particulièrement apprécié le fait que l'auteur ait décidé de nous présenter pour une fois l'après. Oui, quand nous lisons, un thriller, nous connaitrons le coupable à la fin (je crois que je n'ai jamais lu un roman dont la recherche de l'assassin reste inachevée) mais ensuite que se passe-t-il ? Le méchant est en prison, le gentil inspecteur continue sa vie tourmentée jusqu'à la résolution du prochain crime et s'en va boire une bière avec ses collègues, ses amis, sa femme, son fils, ou toutes autres personnes susceptibles de lui permettre de remettre les pieds sur terre ou plus exactement de sortir de la gangue immonde qui l'a entouré durant ses mois d'enquête. Ici nous allons jusqu'au procès, nous entendons les témoins, les avocats, les magistrats, le juge et l'auteur met en musique l'organisation d'un procès. C'est une première pour moi d'aller jusqu'à ce niveau et même plus loin mais ne spoilons pas. C'est sans aucun doute une partie du roman beaucoup moins rythmée, mais j'ai apprécié les questions que se pose le personnage principal le commandant Corso, ses doutes, ses inquiétudes, son mutisme parfois et sa colère intérieure. Oui, ici, après des heures à l'obscurité, la lumière revient et est focalisée sur le suspect : est-il coupable, est-il innocent ? La justice est-elle aveugle ? En tant que lecteur je me suis posée des milliers de questions et j'en conclu que je ne souhaite pas forcément devenir juré d'assise, même si c'est une obligation légale et que nous pouvons être poursuivi si nous ne faisons pas notre devoir civique.


Mais avec Jean-Christophe Grangé, rien n'est simple et pour les amateurs du genre, vous le savez. Pas de twist final, ce n'est pas son genre, mais des miettes ici et là, qui laissent supposer que nous ne sommes peut-être pas dans sur la bonne voie, et puis tout s'accélère encore une fois, et on comprend enfin que ce que nous avions imaginé depuis le début n'est peut être pas inscrit dans le marbre ou ici dans les tables de la loi. Notre cœur balance comme cette que porte celle de cette femme aux yeux bandés, et nous devenons de plus en plus voyant. J'ai apprécié la fin de ce roman, où nous avons toutes les explications de ces actes ignobles et dont la cause première n'est autre que, non, chut, à vous de le découvrir maintenant.


http://exulire.blogspot.com/2019/09/la-terre-des-morts-jean-christophe.html

exuline
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le 4 oct. 2019

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