À Birlstone, dans le Sussex, le manoir de John Douglas est le théâtre d’un meurtre : le corps du propriétaire gît dans une mare de sang, la tête explosée par la double détonation d’un fusil.
Les questions se multiplient : par où l’assassin, aperçu dans les environs, s'est-il enfui, alors que des douves entourent l’édifice ? comment a-t-il trouvé le temps d’ôter l’alliance du doigt de la victime ? pourquoi personne, parmi la société réduite du manoir, ni la femme, ni l’ami, ni les domestiques, n’a-t-il entendu la détonation d’une arme pourtant bruyante ? où se trouve l’haltère qui a disparu du bureau ? pourquoi, encore, l’ami de la victime, Barker, s’est-il attardé seul dans la pièce du crime ?


Sherlock Holmes, secondé par Watson, est appelé en renfort par une police comme d’ordinaire déconcertée et hagarde. Il écarte sans tarder l’hypothèse de l’assassin en fuite – celle-ci ne trouvant nulle part à se confirmer – aussi bien que celle, trop évidente, du couple d’amants meurtriers.
La solution est on ne peut plus classique, et n’échappe pas longtemps à la sagacité du lecteur de romans policiers, rompu à ces lieux communs : le visage avantageusement emporté par la double déflagration n’est qu’une astuce pour ôter l’identité du cadavre, et biaiser l’air de rien le postulat de l’enquête. Et c’est à la faveur d’une ruse que Sherlock Holmes aidera le mort à ressusciter, lorsque celui-ci n’aura d’autre choix que de repêcher nuitamment son déguisement d’assassin, lesté d’un haltère, après que la police, obéissant au détective, a donné l’ordre d’assécher la douve.
La vérité éclate : la femme et l’ami n’ont fait qu’aider le propriétaire à dissimuler un meurtre commis en légitime défense, alors qu’un vengeur armé s’était dissimulé dans son bureau. Mais de quel vengeur, au juste, parle-t-on ? Telle est l’histoire de la deuxième partie qui, de manière assez artificielle, nous transporte outre-Atlantique.
Roman scindé, donc, où l’on reconnaît la prédilection de Conan Doyle pour la nouvelle. Le défaut de l’œuvre, qui n’est pas des moindres, tient précisément à cette scission en deux intrigues distinctes, alors même que l’auteur, sentant la nécessité de sauvegarder la cohérence de l’ensemble, insiste sur son unité.
Et puisqu’il nous est défendu de voir quelque point de liaison entre les localités (l’Angleterre, d’une part, l’Amérique, d’autre part), non plus qu’entre les époques (début du vingtième siècle, d’une part, fin des années 1870, d’autre part), il nous faut bien conclure à un rapport par les personnages. Or, il ne faut pas beaucoup de finesse pour soupçonner l’identité réelle de ce McMurdo, fuyant la police de Chicago au fond de cette vallée du charbon et de la peur.
Y sévit une secte d’assassins, où la solidarité des membres n’a d’assise que le crime crapuleux. Personnage au reste étrangement naïf que le chef McGinty, assez craint et retors pour se faire obéir d’une troupe de gens sans foi ni loi, mais très peu suspicieux et méfiant à l’endroit de la nouvelle recrue à qui il confie rapidement des tâches de la plus éminente importance, cependant qu’il se soucie peu de ce que McMurdo le dépasse bientôt dans l’estime de sa bande de criminels.
On ne sera pas surpris d’apprendre que McMurdo, qu’on aura déjà reconnu pour être John Douglas et dont on est décidément convaincu qu’il a le goût de la duplicité, n’est en fait ni le truand McMurdo ni le bourgeois anglais Douglas mais bien l’agent infiltré Edwards qui, au terme d’un dénouement attendu, moyennant une ruse qui ne trompe que les malfrats, les fait tous prendre, et pendre pour la plupart.
Un épilogue rocambolesque se chargera, plutôt mal que bien, de projeter sur toute cette affaire l’ombre d’un Moriarty toujours plus lointain et fantomatique, dont on aura autant de peine à concevoir la menace qu’on aura senti de peur dans la vallée.


 Un classique du roman policier auquel on accordera donc le mérite de la clarté narrative, à défaut de se reconnaître surpris. Mais sur ce point, Conan Doyle a l’excuse des pionniers de son genre.
ento
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le 13 oct. 2018

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ento

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