Les Pinçon-Charlot montrent, à travers des enquêtes et des promenades sociologiques passionnantes (notamment la visite du 16e arrondissement de Paris par des lycéens du 93), la violence symbolique des oligarques et comment leur domination se manifeste.
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Dans cette guerre psychologique, la classe dominante parvient à légitimer sa position, à accepter ses valeurs et le bienfondé de ses privilèges par le biais de l’art et de la culture, mais aussi du droit conçu par eux (un enfant d’ouvrier aura plus de mal à devenir magistrat qu’un fils de riche).
À ce titre, il est vital de dissimuler l’arbitraire des privilèges pour continuer à s’enrichir en toute impunité. Cette croyance de la réussite naturelle est la clé de voûte du système, c’est elle qui autorise la violence et l’assujettissement. Le talent et le mérite sont systématiquement mis en avant, en lieu et place de l’héritage et du privilège de la naissance. C’est tout gagné : le talent et le mérite sont présentés comme un modèle de réussite sociale, ce qui fait perdurer l’adhésion du peuple à cette hiérarchie des classes.
À l’autre bout de l’échelle sociale, nous sommes intimidés et respectueux de cet univers bourgeois que nous connaissons mal. La contestation sociale, même non violente, est criminalisée ; et par l’intimidation des beaux quartiers, nous sommes tenus à distance de leur monde. Ce livre explique tous les mécanismes de domination, comment asservir le peuple tout en lui donnant l’illusion de la liberté de ses choix.
[...] Les Pinçon-Charlot poursuivent dans cet ouvrage leur travail colossal de dénonciation des ultrariches. Je l’ai lu bien plus vite que la plupart des romans, en trois jours à peine, tant j’étais tenue en haleine par ce concentré de cynisme, cette impunité des fortunes sans complexe et sans morale assurée par la complexité des montages financiers.
[...] Les Pinçon-Charlot invitent à la désobéissance civile, à être curieux des lois et des règles économiques (ce n’est pas un hasard si ces matières ne sont pas au programme scolaire général), à mieux connaître cette classe pour militer en faveur de la justice sociale.
Passionnant, nécessaire, écœurant, ce livre est une bombe ! Voilà l’un des livres de l’année 2015 qui m’aura le plus marquée sans aucun doute, et celui que je conseille à toute personne qui s’interroge sur la « démocratie » française et sur les jeux de pouvoir.
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