La précision des couleurs et des senteurs asiatiques, l’expertise de l’auteur au sujet des peuples locaux et de l’Histoire, les descriptions magnifiques de tous les lieux visités, « La voie cruelle » aurait pu être un brillant – mais simple – récit de voyage.
Ce n’est pas le cas.
Ce n’est pas le cas tout d’abord à cause du contexte de ce voyage : 1939, une Europe au climat explosif, le nazisme prêt à éclater, l’une des guerres les plus meurtrières comme promesse d’avenir.
Ce n’est pas le cas – surtout – grâce à ses protagonistes : deux femmes, suisses, seules, qui s’apprêtent à avaler le bitume pour des milliers de kilomètres en direction de l’Afghanistan. L’une de ces femmes est Ella Maillart : baroudeuse et forte, elle n’en est pas à son premier périple et écrit pour pouvoir voyager plus que l’inverse. L’autre vagabonde est Christina : pseudo pour Annemarie Schwarzenbach - amie d’Ella Maillart - qui tente de se défaire de son addiction dans un long combat douloureux.
Dès lors la drogue devient le pivot essentiel du bouquin. L’addiction lie les personnages autant qu’elle menace de faire exploser leurs relations. Chaque jour devient une épreuve, autant pour l’abstinente forcée que pour sa compagne. Épreuve qui s’additionne à celles rencontrées tout au long de la route.
Bref, « La voie cruelle » est un récit bouleversant sur les relations humaines, une chronique quotidienne et haletante de ce fabuleux voyage, un conte sur les pitreries des voyageuses pour échapper à la censure des gendarmes et autres douaniers. Un récit inclassable, en somme, qui mérite d’être bien mieux connu. Tout comme son auteure, d’ailleurs, qu’on pourrait aisément hisser à la hauteur des autres grands écrivains voyageurs, qu’il s’agisse de Nicolas Bouvier ou d’Alexandra David Neel.



Assez de ce pendule qui oscille entre : "Tu ne vis que pour mourir !" et "Meurs pour vivre !". Nous avons besoin de quelque chose de plus.



Ella Maillart, La voie cruelle


NB : outre l'édition poche facilement trouvable en librairie, une édition grand format et surtout illustrée par les photos des voyageuses (Editions 24 heures) se déniche aisément d'occasion !

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le 27 août 2017

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