Lagom est un mot suédois que l’on peut traduire par « juste ce qu’il faut », « ni trop, ni trop peu », « le juste milieu, la voie médiane entre deux extrêmes ». C’est un art de vivre suédois basé sur la simplicité et la recherche de l’équilibre. L’idée de vivre avec moins n’est pas nouvelle et a déjà été exposée par le philosophe grec Epicure (- 342 ; - 270) : sa classification des besoins naturels nécessaires (manger, boire, dormir) ou non (faire l’amour) et des besoins artificiels (gloire, richesse, pouvoir) reste toujours d’actualité. Sa philosophie est déjà présente chez Diogène de Sinope (- 413 ; - 327) et imprègne d’autres auteurs comme Michel de Montaigne (1533-1592) ou Arthur Schopenhauer (1788-1860). Rien de nouveau sous le soleil ! Ce dernier écrivain a le mérite de la concision avec « L’art d’être heureux » en 93 pages. Anna Brones, dont c’est le 5e ouvrage, en a tiré un livre de 221 pages avec 66 photos (de fleurs, d’intérieurs de maison et de plats cuisinés) d’une page chacune soit finalement 155 pages de texte. Où est l’économie de papier vantée par le concept lagom ? Il y a, bien sûr, de bonnes idées (« Dans un monde lagom, moins, c’est mieux », « Nos réussites et nos échecs ne nous définissent pas. C’est notre façon de vivre qui nous définit », « L’esprit lagom ne consiste pas à rechercher la perfection, mais la juste mesure », Pratiquer la modération, c’est apprécier ce que l’on a, plutôt que s’attacher à ce que l’on n’a pas ») très en phase avec l’époque où le monde est menacé par le réchauffement climatique et les mouvements de population et où il convient de partager les richesses qui ne sont pas illimitées et de protéger la Nature (« On ne se bat pas pour une cause que l’on ne connait pas »). Certes, c’est la réflexion d’une Européenne (« Seul 1 % de la population suédoise effectue des heures supplémentaires », « Gardons en mémoire que la quête d’un équilibre entre vie privée et professionnelle est un luxe. Pour avoir le loisir de réfléchir à cette question, il faut être libéré de la crainte du lendemain et bénéficier d’un revenu assuré. C’est une chance, et il faut en être conscient »). Malheureusement, les idées sont trop délayées et cela relève souvent de « l’enfilage de perles ». Le livre se transforme en un manuel du quotidien, un peu comme les articles qui fleurissent dans certains magazines (féminins ?) avec des conseils sur le travail (« On peut s’autoriser à être juste assez bon au lieu de viser toujours la perfection »), sur l’aménagement intérieur, la mode (« La fast-fashion, avec ses prix dérisoires qui poussent à la surconsommation, est l’antithèse même d’une garde-robe », « Renouvelez votre garde-robe parce qu’elle s’use et non pour suivre les caprices de la mode »), les réseaux sociaux (« Notre cerveau n’est capable d’entretenir de relation amicale qu’avec 150 personnes »), le sport (« Nos ainés avaient des modes de vie suffisamment actifs pour être en bonne santé ») et même avec 11 recettes de cuisine (allant du pain de seigle au gâteau de crêpes, en passant par le concombre mariné à l’aneth) ! Comment dit-on digression en suédois ?