Quand les affiches hantaient nos rêves.
J'ai toujours été fasciné par les affiches de cinéma, par ce requin géant s'apprêtant à gober une pauvre nageuse sans défense, par ce Darkman en proie aux flammes, par la trainée de flamme que laissait la DeLorean de Marty McFly sur l'asphalte... Pour moi, une bonne affiche devait être capable d'enflammer notre imagination devant un film qui nous étais alors inconnu tout en donnant à ceux qui l'avaient déjà vu une furieuse envie de le revoir, l'illustration renvoyant à la face du spectateur une multitude de souvenirs.
Heureux concepteur des affiches des derniers "Star Wars", des "Retour vers le futur" (celle du premier trône d'ailleurs fièrement dans mon chez moi) ou encore de "The thing" version Carpenter, Drew Struzan est un de ces magiciens qui transformèrent un simple outil marketing en pure oeuvre d'art, avant de se faire littéralement bouffer par les executifs des studios et par les nouvelles technologies.
Débutant par une préface aussi hargneuse que nostalgique signée Frank Darabont, le livre de Drew Struzan et David J. Schow est une petite merveille pour tous ceux et celles qui peuvent rester plusieurs minutes à contempler un simple poster, pour les aficionados de Struzan ou tout simplement pour les férus d'histoire du cinéma. Car derrière l'hommage à un grand artiste, "L'art de Drew Struzan" est avant tout une plongée sans concession dans l'univers impitoyable d'Hollywood, un monde où l'argent règne en maître et où l'art n'a sa place que lorsqu'il peut rapporter gros.
A travers les anecdotes aussi savoureuses que passionnantes de Struzan, on assiste, impuissant et le coeur lourd, au récit amer de la chute de toute une profession, à la disparition d'une approche sincère et amoureuse du cinéma et de l'art en générale, une nouvelle ère où les projets avortent aussi vite qu'ils ont commencé, où l'on passe de ça (http://images3.wikia.nocookie.net/__cb20111025090958/harrypotter/fr/images/8/87/Affichefilm_HP1-2.jpg) à ça (http://images2.wikia.nocookie.net/__cb20130424235139/filmguide/images/thumb/2/23/Harry-potter-1st-poster.jpg/500px-Harry-potter-1st-poster.jpg), les dirigeants préférant expédier le boulot en deux heures sur Photoshop que devoir le moindre pognon à un artiste qui pourrait leur casser les noix.
Un triste constat qui n'en oublie cependant pas la magie, l'ouvrage étant accompagné de superbes illustrations nous montrant le travail de Struzan étapes par étapes, de simples croquis aux superbes peintures finales. Un livre indispensable pour toute personne préférant avoir une affiche de "Indiana Jones" dans son salon qu'un Picasso.