Le neuvième jour

Envoutant récit qui sous une écriture précise se plait à nous emporter dans un univers de brumes, de cendres et de silhouettes qui s'engloutissent. Cette charge de cavaliers fantomatiques sur un pont riche en symboles ancestraux se déroule en 1915 mais l'on sent bien que ces soldats pourraient appartenir à des temps autres, plus anciens sans doute. D'une certaine façon ils ne sont déjà plus de ce temps dès le début du récit , ils sont comme enfantés du mythe et ne tarderont pas , après une ultime cavalcade , à rejoindre les limbes dont ils sont issus. Alexander Lernet-Holenia, étonnant auteur autrichien du xx ème siècle dont la voix même, semble parvenir de siècle plus lointains, comme en écho roulant d'orages romantiques anciens, de pluies dont les gouttes ont sechées depuis longtemps mais que l'on peut recueillir encore dans des anfractuosités de roches oubliées pourvu que l'on s'en donne la peine.Sans doute cette voix émane t'elle, à l'image des volcans polonais éteints, de cendres encore chaudes malgré le temps. Pour qui possède "Le dictionnaire des symboles" de Chevalier et Gheerbrant, la richesse de la symbolique des neufs jours que mettent ces cavaliers à franchir le pont d'or qui leur permettra de rejoindre la contrée de la "centurie sacrifiée" n'en apparait que plus signifiante et riche.