Dans le Bonheur national brut, on suit sur deux temps le parcours d'un groupe de copains bretons. La première partie s'ouvre sur l'élection de Mitterrand et l'espoir fou que suscite cet événement. La seconde se ferme sur l'élection de François Hollande. Paul, Tanguy, Rodolphe et Benoît, qui bénéficiaient de l'enthousiasme de leurs 17 ans en 1981, sont maintenant quinquagénaires. La vie leur est passé dessus, et la France, à leur image, est profondément désenchantée.
C'est cette construction en deux périodes qui fait toute la force de ce roman. Une ellipse de trente ans, c'est un beau pari. Qui fonctionne bien, sortant l'histoire de sa grammaire de roman d'apprentissage pour en faire un roman générationnel.
On suivra donc Paul, homosexuel, fils d'un tyran domestique qui le voue à une carrière de médecin quand lui ne jure que par le cinéma. Rodolphe, fils de rouges syndicalistes auxquels il s'oppose par un engagement au PS. Tanguy, qui seconde sa mère aux commandes de l'entreprise familiale et s'oriente vers les écoles de commerce. Puis Benoît, l'indépendant, élevé par ses grands-parents et qui renonce aux études supérieures pour se dévouer à la photo, sa seule et unique passion. Quatre parcours dans une France dont les valeurs ont profondément changé en trente ans (et rarement dans le sens de l'optimisme et de la joie de vivre). Un beau roman, vivement recommandé !