Cette couverture ! Je crois qu’une couverture ne m’a jamais autant donner envie de lire un livre. Un carlin patachon trônant tout simplement sur un fond blanc avec le titre du livre et son auteur en pastille. Simple mais terriblement efficace. J’ai souri. J’ai eu ce petit haussement de lèvres, très léger, mais suffisant pour m’inciter à lire Le chien de Madame Halberstadt, le sixième roman de Stéphane Carlier (éditions Le Tripode) en librairie dès aujourd’hui. D’ailleurs, je n’ai pas encore réussi à retenir le titre alors quand je dois en parler je m’avance avec cette description : « Mais tu sais le livre avec le carlin sur la couverture ! ». Et la connexion se fait immédiatement dans le regard de mon interlocuteur.
Un récit autobiographique
Stéphane Carlier est-il entrain de nous conter sa propre histoire ? Est-ce un récit autobiographique ? C’est la première question que je me suis posée en abordant ce roman à la première personne. Il y est question d’un écrivain, qui a déjà publié plusieurs manuscrits et qui passe ses journées à consulter le classement de sa dernière parution Entrée dans l’hiver sur le site Amazon. Il fait des listes de choses qui le rendent heureux – Stéphane Carlier aime faire des listes- qui plus est, il adore Billie Holiday tout comme l’auteur. Une succession de petits indices que je vais m’empresser de mettre sous le nez de Stéphane Carlier lors d’une prochaine interview que nous avons programmé cette semaine.
Toujours est-il que le personnage principal, Baptiste Roy, nous est introduit avec un certain nombre de casseroles à son actif : son livre est classé 475 758e dans les ventes Amazon, sa femme Maxine vient de le quitter pour un dentiste poilu, et comble du pathétique, il espionne dès que possible la nouvelle vie de son ex dans la grande et belle maison ultra design du soigneur de caries. Autour de lui, son entourage n’est que réussite. Gilles, son meilleur ami, semble épanoui dans sa vie en compagnie de Chacha une influenceuse bien-être et de ses enfants, son père a refait sa vie avec un autre homme et file le parfait amour. Depuis son jogging Domyos, un cachet de Xanas à la main, Baptiste est clairement en mauvaise posture.
Une véritable comédie théâtrale
Jusqu’à l’arrivée de Croquette – et non Courgette – le carlin de Madame Halberstadt une petite vieille avec les jambes de Gru dans Moi, Moche et Méchant. Cette dernière doit se faire opérer et a besoin que son « petit Baptiste » le lui garde quelques jours. Le roman entier tourne autour de l’arrivée de ce chien et de la magie qu’il met sur la route de l’écrivain. Depuis son arrivée, sa vie va mieux et de belles choses arrivent. C’est alors une véritable comédie qui se joue sous nos yeux un peu à la Francis Veber (Le dîner de cons, L’Emmerdeur, La Chèvre). L’auteur joue sur le capitale caricatural de chacun de ses personnages n’hésitant pas à forcer le trait pour nous mener à l’amusement et à la surprise.
Stéphane Carlier offre une épopée burlesque conduite par un écrivain médiocre et un carlin magique avec qui on passerait bien une journée. Chaque chapitre est un lever de rideau où l’auteur réussit, avec cet animal d’une immobilité déconcertante, à nous faire voltiger dans le quotidien de Baptiste. J’ai littéralement adoré ce livre et la multiplication des dialogues apportant de délicieux soubresauts au récit. L’auteur livre une succession d’ups & downs croustillants et ne s’arrête qu’après avoir essoré et sucé jusqu’à la moelle cet écrivain dépassé par les événements, dépassé par sa vie.
Quand un petit brin de magie s’immisce dans nos existences, il est rare de le laisser filer même si le charme ne dure qu’un instant.