* Appropriation émotive *
Une lecture scolaire à la base. Et j'ai même oublié pourquoi ce roman plutôt qu'un autre... Je rédige la critique parce que cela va faire plus d'une heure que j'ai envie de laisser mes phalanges parcourir ce coin. Je ne sais pas exactement les raisons qui me donnent Envie. C'est un livre que j'ai eu l'occasion de commencer dans des milieux médicaux. Une fois chez le dentiste, une autre chez le médecin. Impossible de m'y pencher dans mon appartement jusqu'à aujourd'hui. J'entends encore les échos des rares personnes qui l'ont déjà terminé : "On a envie de lui foutre des claques ! Qu'elle se réveille un peu !" ... Oui que Sarah réagisse. Pour ceux qui ne l'ont pas encore lu, il s'agit de la protagoniste. Et il y a Nathan, son frère. Il est mort.
Au début de ma lecture, je m'énervais moi aussi, avec ce désir tellement inexplicable de lui demander de réagir, de s'éveiller et de reprendre le goût de la vie... Jusqu'à ce que je trouve une parenté. Ses émotions, ses réflexions et sa douleur se sont alors peu à peu emparés de moi, très calmement et c'est ainsi que j'ai commencé à dévorer le reste du récit. M'approprier et transformer. Je rêvais déjà du Japon, je suis convaincue désormais. Des phrases clés, qui sonnent tellement criantes de véracité. Pour preuve, j'ai commencé à plier le bord des pages, pas toutes, mais de plus en plus au fil de ma lecture. Je plie pour retenir parce qu'il y a des réflexions tellement simples, évidentes mais qui ne nous sautent pas directement aux yeux. C'est fou, j'ai toujours l'art de me coltiner une lecture dans un moment stratégique de mon existence, qui va venir bouleverser mes perceptions. Ainsi, le crédit va en grandissant ... Et je me surprends à être plongée, ébahie, intriguée. Je ressens Nathan aussi, peut-être parce qu'il me rappelle quelqu'un que j'ai connu. Et qui a aussi disparu. Je connais Alain parce que les femmes sont nombreuses à choisir la sécurité et l'attachement contrairement à la Passion.
Je mesure l'importance de la déconnexion, du besoin de recul et de recentration. Je me verrai déjà au bord du temple, tentant de trouver cette paix intérieure qu'on nous promet si facilement en Asie...
Je retourne m'abandonner aux quinze dernières pages qui m'impatientent. Mais je ne peux me résoudre qu'à donner une note suffisamment valorisante à mes yeux tout simplement parce que rares sont les livres qui suscitent une réaction si spontanée, si vivante alors qu'on y parle d'errance ...
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J'ai terminé ma lecture. Je me sens comme soulagée. J'ai admiré les descriptions, les teintes métaphoriques, presque le vent qui soufflait à mes côtés. J'ai arboré ces falaises, ai presque vu le vide sous mes pas et ai fait demi tour. J'ai eu ma réponse concernant Alain. Quant à Natsume, je pense qu'il est comme un Jiminy cricket, dont les phrases résonneront sans doute éternellement.
On s'attache aux personnages, on y croit plus fort qu'en son âme intérieure. Et même si l'on désire douter, on s'y raccroche coûte que coûte. Comme quoi, ce livre aura tout de même été très positif malgré sa noirceur et la pesante souffrance qui y règne.
Un fantôme qui revient à la Vie...