les Alliés vont décidés de faire appel à un peuple réputé pour son attachement à la nature et son habilité à évoluer dans ce type d'environnement sauvage : les Elfes. Cinq de ces créatures majestueuses et redoutables acceptent ainsi de se rendre en Birmanie afin de former les soldats Alliés à de nouvelles tactiques, à la seule condition que les accompagne un certain J. R. R. Tolkien, paisible professeur à l'université d'Oxford, dont la présence déterminera l'issue de leur mission. Il faut avouer qu'encore une fois, Christophe Lambert ne fait pas dans le classique !
Le lecteur va donc suivre tout au long du roman un petit commando, les Chindits, qui va entreprendre une mission de sabotage des communications japonaises au delà des lignes ennemies. le roman est assez court mais très rythmé, alternant efficacement scènes d'action et moments plus intimistes afin de ne jamais laisser décroître l'intérêt du lecteur. On voit bien que l'auteur s'est minutieusement documenté, aussi bien sur cette campagne de Birmanie et ses enjeux stratégiques pour l'issue de la Seconde Guerre mondiale, que sur Tolkien lui-même dont il brosse un portrait saisissant. En se basant essentiellement sur la correspondance de l'auteur, Christophe Lambert est parvenu à donner vie au père de « Bilbo le Hobbit » et du « Seigneur des Anneaux » auquel on ne manque pas de s'attacher et qui nous émeut à de multiples reprises (la scène lors de laquelle le professeur relate à ses compagnons de nationalités très diverses l'histoire de la Terre du Milieu est particulièrement touchante et témoigne bien de l'universalité des thèmes abordés dans ses oeuvres). Instruit, imaginatif, très « anglais », et surtout soucieux de mener une vie paisible bien éloignée des aventures vécues par ses héros, le lecteur découvre Tolkien tel qu'il se l'imaginait et se plaît à repérer les points communs entre l'expérience birmane du professeur et ce qui deviendra des années plus tard « Le Seigneur des Anneaux », manuscrit uniquement en cours de rédaction au moment de l'intrigue.
Car au-delà de l'exotisme de cette jungle birmane et de l'audace de la mission entamée, il faut bien avouer que ce qui fascine avant tout le lecteur, c'est le travail effectué par l'auteur afin de créer le maximum de ponts entre l'oeuvre de Tolkien et la situation à laquelle il se retrouve confronté dans « Le commando des immortels ». le lecteur fin connaisseur du « Seigneur des Anneaux », appréciera certainement d'assimiler telle scène ou telle anecdote du roman à un passage de la célèbre trilogie : le combat contre l'araignée Shelob, la relation entretenue entre Frodon et Sam, et bien sûr la descente dans les mines de la Moria et l'épisode du pont de Khazad-dûm et du Balrog. On peut également saluer la qualité de la réflexion de l'auteur concernant les mythes dont il questionne l'essence même en tentant de répondre à cette épineuse question : « pourquoi les grandes histoires épiques et initiatiques, écrites (ou narrées) depuis la nuit des temps, se ressemblent-elles tellement ? » L'occasion pour Christophe Lambert de mettre en avant la complexité de l'oeuvre de Tolkien mais aussi de revenir sur d'autres grands récits légendaires, de Beowulf aux contes oraux des tribus birmanes locales. Enfin, il est évidemment assez fascinant d'assister à la rencontre entre un auteur et l'une de ses créations les plus marquantes. Alors, à votre avis, que pensent les Elfes de la Terre du Milieu... ?
Christophe Lambert signe avec « Le commando des immortels » un roman passionnant qui vous tiendra en halène du début à la fin et qui ne manquera pas de ravir les amateurs de fantasy en général, et ceux de Tolkien en particulier. Une lecture originale mêlant habilement action et réflexion, et que je recommande chaleureusement !