Après une longue carrière dans une usine de papier, Burke Devore, américain typiquement moyen, est victime de compressions de personnel et découvre le morne vide du chômage. Ses recherches, courriers et entretiens n'amènent à rien et les finances de sa famille virent au rouge. Il en arrive à ce constat amer : "Nous sommes trop nombreux dans l'arène, et il faut que je me fasse à l'idée que je ne serai jamais le premier choix de personne." Et puis, dans un article d'une revue spécialisée sur le papier, il apprend l'existence d'un certain Ralph Fallon, qui a "son" boulot. Comprenez : le poste parfait, près de chez lui et accordé avec ses propres compétences. Son problème étant de récupérer urgemment du travail ; et l'unique obstacle pour cela étant Fallon ; une brève réfléxion l'amène à la solution parfaitement logique : éliminer l'obstacle.
Grâce à une arnaque ingénieuse, Devore obtient les CV de tous ses concurrents potentiels, d'autres chômeurs de son secteur, de sa région, qui se placeraient avant lui dans la course au poste, et décide simplement de les tuer un par un, avant de s'occuper de Fallon, puis de se faire embaucher à sa place. Son plan est soigneusement préparé, les victimes localisées et espionnées, toutes les précautions prisent pour brouiller les pistes. Et ainsi se déroule le roman, comme le déroulement mécanique d'une stratégie comme une autre pour sortir du chômage, les mises à mort se succèdent, entrainant le lecteur dans une ambiance de plus en plus noire et malsaine, en même temps que le tueur débutant gagne en aisance ce qu'il perd en humanité. Appliquant la sélection naturelle, prédateur pour ne pas finir proie, Devore est le symbole ultime de la déchéance et de la désespérance des laissés-pour-compte, pions insignifiants dans la grande machine financière. Le récit de son atroce tentative de survie laisse haletant et indécis, tant ses crimes paraissent faibles à côté de ceux qu'il dénonce.