« vous laissez pas cogner le cul par la porte en sortant »
« la maison, c’est l’endroit où on reste le temps de soigner sa cuite »
Le ton étant donné, ça a déjà fait la moitié du taf sur le plaisir que j'ai à partager après avoir lu ce polar.
(Un foutu bon polar si tu veux savoir).
Du magistral James Crumley, que j'avais découvert et adoré avec Fausse piste.
Comme dans ce dernier on a affaire à un détective cynique, partisan des cocktails alcools/amphet' et comme pour Fausse piste on se rend compte que le Kiss Kiss Bang Bang de Shane Black est un hommage au roman du genre. Du coup si t'es déjà conquis par ce genre d'univers, tu peux y aller les yeux bandés. Et j'te mets au défi de pas sourire où d'éclater de rire à certains passages.
Côté pitch, le détective C.W. Sughrue, vétéran de la guerre du Vietnam est engagé par une bourgeoise pour retrouver son alcoolique et écrivain d'ex-mari Abraham Trahearne. Celui ci étant parti écumer les bars à la recherche d'originalité et d'inspirations. Très vite Sughrue mettra la main sur l'homme recherché, non sans lui avoir collé une balle dans le cul, et rencontré Fireball, un bulldog lui aussi alcoolique. Une fois l'affaire résolue, Trahearne propose au détective de devenir son pote de boisson.
Ce faisant Crumley démonte les codes du polar classique en imposant un style qui lui est propre et qui est loin d'être déplaisant. Ça part dans tous les sens (entre le Montana et la Baie de San Francisco). C'est typiquement le genre de roman qu'on peut proposer à quelqu'un qui adore les polars et aux autres qui souhaitent lire du polar qui ne se prend pas au sérieux tout en gardant une sacrée dose d'ingéniosité.
Les illustrations de Thierry Murat collent à merveille avec l'ambiance. L'Amérique post flower power avec son lot de traumatisés des deux guerres ; l'une gagnée et l'autre fiasco total résonnent complètement dans la construction du scénario et des dialogues. Les personnages féminins ont un rôle égal à celui des hommes, bien loins des femmes futiles qu'on a l'habitude de lire dans ce genre d'enquêtes où elles ne sont réduites qu'à tenir un pistolet par désir de vengeance, où de coucher avec le héros de l'histoire.
Allez, emballé c'est pesé, du grand art pour ma part et une soudaine envie de me baffrer des autres aventures de Sughrue histoire de l'entendre répliquer aussi bien qu'il sait cogner !