A chaud (je l'ai fini il y a quelques heures et j'ai du mal à formuler ce que je ressens pour l'instant. Il va rester avec moi quelques jours, je le sais. Brume sur mon petit coeur).
Arundhati Roy annonce la fin dès les premières pages, mais pas le dénouement... la suite d'événements qui mène à l'issue tragique, que Roy qualifie d' "Histoire", est implacable dans sa cruauté. J'avais entrevu un "coming-of-age", pour ces deux jumeaux, Estha, le garçon, et Rahel, la fille, qui sont confrontés à la mort de leur parfaite petite cousine anglaise, Sophie Mol, en Inde du Sud. Mais le trauma n'est pas un rite de passage, et les chapitres dédiés aux jumeaux adultes sont particulièrement efficaces pour souligner sa force destructrice.
Il y a des gentils et des méchants dans cette histoire ; ils sont tous, à presque égale mesure, punis par la vie, mais la société indienne et ses travers sont peints avec un tel niveau de détails (castes, lutte de classe, misogynie, religions...) que l'on est enclins à leur trouver des circonstances atténuantes. Mais aucune peine n'est allégée, et l'on referme le livre avec le sentiment que la mécanique bien huilée, infaillible de l'Histoire avec son grand "H", aurait bien mérité un Deus Ex Machina. Le Deus des petits riens.
Le style répétitif de Roy permet d'appuyer certaines de ses trouvailles métaphoriques (superpuissantes pour certaines), mais peux fatiguer. C'est mon seul bémol.
Je vous conseille vivement ce roman.