Le Garçon
7.5
Le Garçon

livre de Marcus Malte (2016)

Gros roman (535 pages) de cette rentrée littéraire qui ne devrait pas passer inaperçu, du moins je l’espère sincèrement. Parce que c’est Zulma. Parce que c’est Marcus Malte. Parce que ce roman est formidable. Il possède un souffle et une force rares. Il est écrit en phrases courtes, rapides, mais ne néglige pas pour autant les temps d’arrêt sur les descriptions des lieux, des personnages, des rapports entre eux. Il est tour à tour et parfois tout en même temps, roman naturaliste, puis roman initiatique, puis roman d’amour (très) érotisant, puis roman de guerre et même épistolaire mais dans un seul sens puisque le garçon est illettré. Certains pourraient croire en me lisant à une certaine confusion, mais que nenni, Marcus Malte maîtrise de bout en bout et se livre à un exercice brillant. La meilleure preuve, c’est que l’on ne voit pas vraiment passer les pages et que l’on aurait même envie que cette histoire se prolonge pour passer plus de temps avec le garçon devenu homme.


Beaucoup de références littéraires (Hugo en tête, mais aussi Verlaine, …), musicales (Mendelssohn et ses romances, Liszt, Chopin …), c’est parfois très lyrique, Marcus Malte se laissant aller à des envolées toujours arrêtées par la réalité même si celle-ci peut parfois se trouver emportée par ce lyrisme : "Mais sa beauté méritait-elle vraiment ces lauriers qu’il lui tressait ? Son haleine était-elle, ainsi qu’il le lui susurrait, aussi exquise que la plus exquise des brises du printemps ? L’éclat doré de ses iris aurait-il fait pâlir jusqu’aux rayons de l’astre solaire ? En réalité… En réalité, pourquoi pas ? N’est-ce pas le propre de l’amour que d’éblouir et d’émerveiller ? De rendre divin ce qui ne serait qu’humain ?" (p.207)


Marcus Malte crée un enfant tout neuf, une âme pure et vierge qui s’éveille à la vie des hommes pour le meilleur (la musique, la littérature, l’amitié, l’amour, …) et pour le pire (la guerre). Les pages sur l’amour sont troublantes, très belles, fortes en émotion et je vous le disais un peu plus haut, parfois torrides. Elles sont intimement liées à celles de la découverte des arts et de l’ouverture à ce que la vie offre de plus beau. Marcus Malte aurait pu s’arrêter là et l’on aurait eu un très beau roman d’amour. Mais le destin de son personnage est le plus fort et arrive le roman de la guerre, terrible, violent. Les mots s’enchaînent rapidement, les pages également. Elles laissent un peu groggy et essoufflé. Elles débutent par un chapitre court -une longue phrase de quatre pages et trois phrases très courtes- et assez drôle sur la forme moins sur le fond qui m’ont immédiatement fait penser au poème de Jacques Prévert Les belles familles. Ce n’est pas le seul passage plus léger du roman, mais c’est l’ultime.


Un roman bouleversant qui ne peut pas laisser indifférent. Je ne crois pas que l'on lira des critiques ou articles à lui consacrés qui seront mièvres ou tièdes. Des personnages inoubliables : un garçon innocent qui découvre l’épreuve du monde et une amoureuse passionnée prête à –presque- tout pour sauver son amour. Je n'hésite pas, je le classe en coup de cœur.

YvesMabon
10
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur.

Créée

le 30 août 2016

Critique lue 647 fois

4 j'aime

Yv Pol

Écrit par

Critique lue 647 fois

4

D'autres avis sur Le Garçon

Le Garçon
MichaelFenris
8

Malot, Cendrars et bien d'autres...

A-t-il eu un nom un jour ? Nul ne le saura, surtout pas lui. Peut-être sa mère, encore aurait-il fallu qu’elle ne meurt pas en le laissant au milieu de la forêt. Muet, illettré, vivant en ermite,...

le 11 déc. 2018

4 j'aime

1

Le Garçon
YvesMabon
10

Critique de Le Garçon par Yv Pol

Gros roman (535 pages) de cette rentrée littéraire qui ne devrait pas passer inaperçu, du moins je l’espère sincèrement. Parce que c’est Zulma. Parce que c’est Marcus Malte. Parce que ce roman est...

le 30 août 2016

4 j'aime

Le Garçon
Nadouch03
9

Critique de Le Garçon par Nadouch03

Voici un roman totalement à part, inclassable et déroutant, sorte d'OVNI en cette rentrée littéraire 2016. Le garçon, c'est un garçon sans nom, sans passé (ou si peu, la mort de sa mère et une vie...

le 17 janv. 2017

2 j'aime

Du même critique

Hoka Hey!
YvesMabon
10

Critique de Hoka Hey! par Yv Pol

Très belle grosse bande dessinée. Traits, couleurs, paysages, personnages très soignés pour un ouvrage de qualité. Les paysages sont superbes, on se croirait dans un film. Les personnages ont tous...

le 7 mai 2023

7 j'aime

La Couleur des choses
YvesMabon
10

Critique de La Couleur des choses par Yv Pol

Précisions liminaires : Martin Panchaud est suisse et cet album est paru d'abord en langue allemande en 2020 avant de trouver un éditeur français. Il vient d'obtenir au salon de la bande dessinée...

le 13 févr. 2023

6 j'aime

Zemmour contre l'histoire
YvesMabon
10

Critique de Zemmour contre l'histoire par Yv Pol

J'ai du mal à saisir la ligne éditoriale des éditions Gallimard qui publient ces tracts hautement instructifs et intelligents et qui, il y a quelques années voulaient publier les pamphlets...

le 6 mars 2022

6 j'aime