Avouons tout de suite notre (légère) déception à la lecture du dernier bouquin de l'américano-vénitienne Donna Leon.
En dépit de son titre accrocheur, on n'a guère accroché.
Petit coup de fatigue et d'usure de l'un ou de l'autre, du lecteur ou de l'auteur ?
C'était pourtant prometteur : encore un polar sans vraiment de crime (rappelez-vous le Requiem), à peine un cadavre. Celui d'un jeune homme sourd-muet et un peu attardé qui s'est étouffé avec des pilules. Gourmandise maladroite ou tentative de suicide ou autre chose ?
Et qui était ce garçon discret que Guido Brunetti voyait régulièrement dans son quartier ?
Personne ne lui demande vraiment d'enquêter mais notre commissaire vénitien tourne un peu en rond et se pique de curiosité pour l'histoire du garçon qui ne parlait pas. D'autant que le mystère s'épaissit très rapidement : aucune trace du garçon dans aucun des fichiers administratifs de la région (et les dieux de la lagune et du clavier savent que si la Signora Elettra n'a rien trouvé, c'est qu'il n'y a rien de rien !).
[...] « Rien ? » Elle avait cherché à d’autres endroits, sans prendre le soin de lui en faire part. « Rien. D’après les preuves officielles, il n’existe pas et n’a jamais existé. »
Qui était donc ce jeune homme ? Qui cherche à cacher quoi ?
La noble famille Lembo semble avoir bien des secrets enfouis dans son passé.
Malheureusement tout cela, comme Brunetti lui-même, tourne un peu en rond et un peu trop longtemps.
Est-ce l'effet de l'automne qui souffle le froid et l'humidité sur les canaux de la Sérénissime ? La nonchalance vénitienne de Guido Brunetti qui nous était plutôt plaisante jusqu'ici, visiblement ne fonctionne plus.
On sent Donna Leon se reposer sur ses lauriers, papillonner de ci de là, hésiter entre nous parler de ceci ou de cela, philosopher à tout bout de champ, mais sans vraiment chercher à entraîner son lecteur avec elle.
[...] À un moment donné, Paola formula un souhait et utilisa de ce fait le subjonctif. Brunetti sentit les larmes lui monter aux yeux face à la beauté de toute cette abstraite complexité.
Même si l'on fait partie, nous aussi, des amoureux de la langue, ce subjonctif nous a paru bien fade et sans relief.