Je viens de finir le livre et en premier lieu il faut dire que pour une fois le marketing n'était pas mensonger, j'ai vraiment été scotché comme avec du velcro, impossible de lâcher le livre avant de l'avoir fini.
J'ai été un des "nouveaux" de la rentrée 2017, professeur stagiaire en lycée professionnel enseignant les lettres, l'histoire, la géographie, l'éducation civique. Je me suis retrouvé en Lorraine alors que j'étais originaire d'Occitanie. Sacré dépaysement. Mais bon, même si je n'ai jamais eu la vocation, j'étais là quand même avec un espèce d'idéal: changer le monde ça passe par éduquer différemment les jeunes.
4 mois plus tard j'étais en burn out. Votre livre me parle parce que je l'ai vécu: je pensais au suicide chaque matin en allant au travail et chaque soir en rentrant. En traversant le pont, j'avais envie de me noyer dans l'eau glacée de la Moselle. Ou alors flinguer mes élèves. Mais en même temps je savais qu'ils n'étaient pas vraiment coupables, que c'est à cause de déterminismes sociaux qu'ils en étaient là, à agresser les seules personnes qui peut être souhaitaient sincèrement les aider: leurs profs.
Et on sent que les politiciens et même l'administration s'en foutent, tant des élèves que des profs. Un élève m'a menacé avec un pied de table cassé. Ils ont essayé de mettre le feu à la classe. Ils ont amené des pétards, ils ont multiplié les batailles à la sarbacane et le reste du temps ils n'écoutaient rien. Je signalais tout ça et en haut ils ne faisaient rien. C'est ça qui est dur aussi l'absence totale de soutien de l'administration, #pasdevagues. On est censé enseigner, on se retrouve à éduquer, à faire le boulot que les parents n'ont pas fait. On est surveillant, animateur, éducateur spécialisé, assistante sociale, infirmière... mais presque jamais prof.
J'ai préféré démissionné que me foutre en l'air. Je n'aurais été « prof » que quatre mois, plus un mois d'arrêt maladie et un de vacances, avant de partir. De nombreux collègues, pourtant là depuis longtemps et expérimentés, m'ont dit qu'ils avaient vraiment envie de faire de même, tellement leur métier était devenu difficile, tellement les élèves en général et cette classe en particulier (qu'on m'avait confié alors que j'étais stagiaire et qu'on savait qu'elle était ingérable) leur portait sur les nerfs.
Les réformes délirantes et réactionnaires s'ajoutent aux réformes délirantes et réactionnaires. Le cas Blanquer est symptomatique: ancien membre d'un cabinet de droite, très proche de l’association d'extrême droite SOS Education, ce n'est pas de ce genre de profil aux idées archaïques dont a besoin le pays, dont ont besoin les profs, dont ont besoin nos élèves. Je ne suis vraiment plus optimiste quand à l'avenir. Mes camarades de promotion, qui eux ont réussis à survivre à l'année de titularisation, sont tous au bord de la démission. A cause des élèves, du manque de moyen, du manque de soutien, mais surtout à cause des réformes de l'enseignement professionnel qui sont en préparation et qui vont finir de casser leur métier.