Trop c'est trop. Comme si une malédiction frappait les auteurs S.F dès lors qu'ils s'attachent à des mondes trop immenses pour finalement être contenus dans un seul bouquin. Un peu l'effet Genefort avec sa série Omale. Ici, en plus de la dimension géographique, il y a la dimension temporelle puisque Farmer brasse toutes les époques de l'histoire de l'humanité, en incluant dans sa narration des personnages de toutes ces époques.
Après deux tomes plutôt courts, mais finalement assez focalisés, le premier sur Burton, le second sur Mark Twain, l'auteur a changé de format et nous a pondu une suite et fin en près de mille pages et en deux volumes. Ce labyrinthe magique est ainsi la suite directe du noir dessein, dont, soit dit en passant, les titres me laissent quelque peu perplexe. Et, en voulant se montrer exhaustif, il va, à mon sens, se noyer dans une foultitude de détails et de péripéties, qui mis bout à bout forment un tout un peu fastidieux à la lecture. Et encore, il m'a semblé ici que par rapport au tome précédent, Farmer montrait une tendance moins marquée aux digressions personnelles et vaguement philosophiques. A moins que je n'ai parcouru machinalement les passages concernés, c'est ma foi bien loin d'être impossible.
Le bouquin est tout de même sauvé par deux morceaux de bravoure : la bataille aéronavale entre le Rex Grandissimus et le Bateau Libre, d'une part, et l'exploration de la tour des éthiques, d'autre part, qui arrivent respectivement en milieu et en fin de lecture. Encore que, là aussi, il se noie par moments quelque peu dans les détails. Mais la fin est plutôt prévisible dès lors que l'on comprend qu'elle se traduira par un face à face entre Alice et un ordinateur.
Pour tirer un bilan de la saga, puisque je vais laisser de côté le cinquième tome pour l'instant (Farmer dit lui-même dans son avant-propos que la série s'achève avec ce quatrième tome), disons qu'il s'agit d'une œuvre incontestablement ambitieuse, sans doute un peu trop en définitive. Dans ces livres-univers qui décrivent un monde gigantesque, je peux comprendre que l'auteur soit sans cesse tenté de décrire encore et encore des détails. N'est pas Tolkien qui veut, et encore, même lui s'est parfois noyé dans les descriptions. Car, pour en revenir au fleuve de l'éternité, je crois tout de même que le meilleur format est celui des deux premiers tomes, des histoires courtes et focalisées. Ce même si lecteur peut se sentir frustré de ne pas appréhender un monde imaginaire dans toute son immensité et sa complexité.