J'avais été assez bluffé, il y a de cela il est vrai quelque chose comme 25 ans, par la trilogie berlinoise de Philip Kerr, des polars historiques se déroulant en Allemagne en 1938, 1939 et 1945 qui nous faisaient découvrir - entre autres douceurs - l'administration policière nazie. Alors quoi de mieux, en cette période hautement footballistique, que d'entamer une nouvelle série se déroulant dans le monde du football. C'est du moins ce que j'avais imaginé. Et là, cruelle déception !!
Tout ce qui faisait les qualités de la trilogie berlinoise, le rythme, les scénarios, les personnages par exemple, je ne l'ai pas du tout retrouvé dans "Le mercato d'hiver". Ce bouquin est émaillé d'anecdotes, certes réelles, sur le monde du foot professionnel anglais, et qui cassent totalement le rythme de la narration. On a l'impression que Kerr cherche avant tout à étaler sa culture footballistique, cela étant prétexte à nombre de digressions, qui enrobent ou noient, c'est selon, un scénario d'enquête policière peu imaginatif, voire indigent.
Les personnages sont pour la plupart caricaturaux, à commencer par le principal, Scott Manson, ancien footballeur devenu entraineur, mais qui siège au conseil d'administration d'une grosse entreprise créée par son père, a fait des études supérieures, est connaisseur en art contemporain, a séjourné plus d'un an en prison à la suite d'une erreur judiciaire et vit en couple (du moins au début du roman) avec une psychiatre spécialisée dans les troubles de l'alimentation. Va t'on apprendre dans le prochain opus qu'il a été roadie des Stones ou qu'il a pris part à un vol spatial ?
Autre irritant pour le lecteur que je suis, l'auteur cite systématiquement les marques des vêtements, téléphones et autres tablettes de ses personnages, ainsi que de la machine à café (une Nespresso, lol) de Scott Manson. Est-ce du Branding ou bien veut il nous montrer dans quel luxe vivent footballeurs professionnels et dirigeants ? Accordons lui le bénéfice du doute, car la seule qualité que j'ai trouvée au "Mercato d'hiver" est la peinture qu'il dresse tant bien que mal du football-business : dirigeants entretenant des liens étroits avec les mafias, dessous de table, agents véreux, joueurs complétement immatures et totalement assistés par leurs clubs.
Et - en guise de conclusion pour initiés - j'imagine qu'on ne retirera pas à Kerr, supporter d'Arsenal selon la quatrième de couverture, le plaisir d'avoir attribué le rôle de victime dans son livre à un clone parfait de Mourinho...