Bonjour.

Vous voulez écrire et voir votre roman publié en ce premier quart de siècle ?

Facile.

Écrivez plus classiquement une "fable" (ça vous mettra peut-être à l'abri, mais pas sûr), peuplée essentiellement d'hommes viriles, meneurs d'hommes, bons chasseurs, bons pères avec leurs fils, au caractère bien trempé, inventif et affirmé, rapportant au foyer d'amples provisions de viande chassée, prenant les décisions qui s'imposent et menant à bien leur réalisation. Peaufinez bien tout ça. Au besoin, vous trouverez beaucoup de matière première dans les bons vieux films de cowboys et d'Indiens hollywoodiens.

Puis, après avoir laissé bien égoutter, vous transposez tous les personnages masculins en caractères féminins, en y adaptant les caractères sexuels dominants nécessaires à la manœuvre, bien entendu. Modifiez quelque "détail", comme par exemple, imaginez que ces êtres vivent dans un autre monde que vous nommerez "Le Monde véritable", sorte d'univers parallèle au nôtre, supposé mort.

Eurêka ! Vous obtenez un livre tout à fait publiable en 2024.

On y trouvera des femmes aux pouvoirs étranges se changeant en louves (...de garde "?), convoquant des pow-wos où elles emmèneront leur compagnon, et parleront gravement en fumant le calumet.

Je n'invente rien de ce plagiat d'une certaine masculinité.

Ceci à peine passé le milieu du bouquin où, comme on s'y attend, les deux protagonistes féminines suivies jusque là, tombent dans les bras l'une de l'autre en effusions sexuelles, puisque leurs "besoins physiques n'excluent personne"(sic).

On pourrait espérer que cette "fable" ne soit qu'une plaisanterie aux dépens d'un féminisme mal digéré.

Sinon, ce genre littéraire serait d'un mercantilisme grossier, croyant tirer sa légitimité de la récupération de tous les bords féministes, en ratissant large.

Ce serait en fait une trahison organisée de ce que les femmes tentent d'obtenir : la reconnaissance de leur statut et de leurs droits de femmes, et non pas une singerie de transfert des genres et de leurs attributions sociales.

Je ne recommande pas ce fatras, mal écrit par ailleurs, pour des enfants mal grandis, et qui tente de nous vendre notre monde déformé en un monde virtuel indigne des femmes comme des hommes, et qui n'est même pas drôle.

En fait, on peut soupçonner cette oeuvre d'art d'être subventionnée à l'exportation-traduction, comme ça se fait, dans une perspective de propagande linguistique et culturelle.

Que le Grand Manitou nous protège !


P.S. : la page 138 de l'édition Le cherche midi 2024 montre une frappante méconnaissance du monde des rapaces, de leurs tailles relatives ("les faucons à la plus large envergure" ?!), de leurs façons d'utiliser leurs serres, pour ne rien dire de leurs "coups de bec", autant de façons surprenantes pour des rapaces diurnes. Il n'aurait plus manqué que des vautours en piqué et des condors de passage !

Autre post scriptum, celui-ci adressé au traducteur Jean-Luc Piningre : le terme anglais "large" se traduit le plus souvent par "grand" ou "gros", en bon français. Ainsi un rapaces est-il de petite ou de "grande envergure". Il en va de même des "large cars", ce sont de grosses ou grandes voitures, en aucun cas "larges". De même qu'un "large man" ne sera sûrement pas un "grand homme", comme le prétendent certains logiciels mal fichus. Etc ... Qu'on se le dise dans le monde des traducteurs aux talents si variés. C'est un métier, non ? Et l'on est ravi quand de belles traductions n'en sont pas moins fidèles. Ce qui importe peu dans le présent ouvrage, qui n'est pas fidèle à grand chose, il est vrai.


Barbiraggio
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le 23 nov. 2024

Modifiée

le 23 nov. 2024

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