Au jardin des délices
Inquisition et peintures mystérieuses… Jérôme Bosch est l’un des peintres les plus mystérieux de son temps, sa vie ainsi que l’interprétation de son oeuvre, sont encore mal connues. De quoi faire...
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le 7 mai 2018
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Inquisition et peintures mystérieuses…
Jérôme Bosch est l’un des peintres les plus mystérieux de son temps, sa vie ainsi que l’interprétation de son oeuvre, sont encore mal connues. De quoi faire fructifier l’imagination de Peter Dempf et ouvrir le champ des possibles.
Lorsqu’Oris Petronius arrive à Bois-le-Duc pour apprendre aux côtés de Jérôme Bosch, la ville est ardemment surveillée par une Inquisition qui lutte par le bûcher contre ce qu’elle considère être hérétique. Baerle est un dominicain intraitable, manipulateur et bourré d’orgueil, il est toujours là où on ne l’attend pas. En peignant sous l’autorité de Bosch, Petronius ne s’attendait pas à être mêlé aux plus hautes arcanes des pouvoirs religieux. Les organisations secrètes et occultes sont légion à Bois-le-Duc, Petronius se perdra au coeur des mystères religieux et picturaux….
Depuis que Dan Brown et son Robert Longdon existent, l’écriture de thrillers historiques traitant de l’art, de la religion, des sectes et globalement de l’existence humaine sur terre, est un défi. Le mystère Jérôme Bosch a la qualité de traiter d’un sujet peu abordé, novateur et surtout peu accessible. Ainsi Peter Dempf n’écrit pas du Dan Brown et ne tombe pas dans le piège de l’algorithme d’assistance créative mais n’en n’évite pas pour autant quelques lourdeurs et naïvetés peu dommageables. Certains avis avancent l’idée que Peter Dempf se moque en réalité du genre romanesque auquel il s’attelle…possible, mais dommage pour le professeur d’histoire qu’il est. Il est difficile de mêler fiction et histoire, il me semble que Ken Follet avait relevé le défi avec Les Piliers de la terre…Peter Dempf est toutefois plus crédule dans sa manière d’aborder la fiction.
Le contexte historique de l’Inquisition aurait peut être mérité plus de noirceur et des rebondissements plus espacés dans le temps de l’intrigue. On ne comptera pas en effet, le nombre de fois où Petronius se trouve dans une situation vraisemblablement insoluble mais dont il parvient à sortir miraculeusement en à peine deux pages du roman. Trois pages plus tard, il recevra un coup sur la tête et s’en sortira, évidemment. L’Inquisition présentée par Peter Dempf se livre à des méthodes dignes de la DGSE ou du FBI comme vous préférez, il semble ainsi que Baerle soit doté du don d’ubiquité ou de la capacité géniale d’apparaitre dans le dos de Petronius à chaque chapitre. Le passage où celui-ci tombe dans une cuve de teinturier devient alors peu crédible, si le héros voit sa mort approcher, le lecteur lui, n’y croit pas une seule seconde.
Peter Dempf sauve son roman grâce à sa connaissance pointue de l’œuvre de Jérôme Bosch, l’idée de reproduire le Jardin des délices (1505) en première et en quatrième de couverture est très bonne et permet au lecteur de suivre les descriptions du tableau dans les moindres détails. Les explications ésotériques sont également évocatrices, l’auteur se livre notamment à un exposé sur les significations religieuses et philosophiques des chiffres, on y apprend le double sens d’interprétation de l’image de la chouette dans l’art (sagesse et enfer). Il est ainsi toujours plaisant de côtoyer un artiste et de le mêler à une histoire romanesque.
Plusieurs critiques ont relevé le manque de profondeur des personnages évoluant en 2013. Car oui, le postulat de départ débute à notre époque : un prêtre qui reprend le nom de l’inquisiteur du XVème siècle a abîmé l’œuvre de Jérôme Bosch, un expert en art et une psychologue tentent donc de comprendre les raisons de cet acte de vandalisme. Les passages qui se déroulent au XXème sont peu nombreux, il est donc difficile de s’attacher aux protagonistes. Dès lors, le lecteur en vient à avoir hâte de retrouver l’Inquisition dont la narration est brutalement coupée.
Il semble qu’il faille lire le roman de Peter Dempf d’une traite ou deux. J’ai peut être laissé trop de temps s’écouler entre le début et la fin de cette lecture. Si Dan Brown m’a quelque peu déçue avec Origines (par sa construction narrative similaire à ces autres romans), j’avais pris plaisir à le lire et à tourner les pages pour dénouer le mystère. Peter Dempf n’a peut être pas laissé planer suffisamment de mystère autour d’un Jérôme Bosch pourtant encore bien secret pour nos historiens de l’art…
Peter Dempf – Le mystère Jérôme Bosch – Le Cherche Midi – 2017
Créée
le 7 mai 2018
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