Le Nom du vent, c'est un grand et beau moment de fantasy qui ira se loger, on le pressent, au pays des classiques du genre et où l'on se replongera, les jours de marathon ou de tempête de neige, près de son feu chéri pour le savourer à pleines dents, comme un muffin. Le Nom du vent n'est qu'un premier volume, c'est une histoire qui se présente longue, complexe et tomaisée. Vous me direz que c'est tautologique puisque nous sommes en pays fantasy et qu'en de telles terres on ne sait pas faire court (sauf Justine Niogret et elle fait ça très bien) - il faut du temps pour poser un univers, une histoire, une mythologie... Ce temps-là on le prend en large et très peu en travers. Quand je dis "on", vous savez que je parle de l'aubergiste de la Pierre levée.
Car c'est le fameux Kote qui prend le temps de poser son autre lui, son ancien lui, son lui dont il se souvient et qui explique l'aujourd'hui - mais sans la lourdeur d'une autobiographie, même fictionnelle. Kote s'assoit et raconte. Il raconte la formidable, l'improbable, la rebondissante, la difficile vie de Kvothe, cette vie ancienne qui palpite sous la surface de sa peu d'arcaniste durcie par les années et les malheurs. Dans la langue déliée de conteur, les événements les plus heureux et les plus tragiques se succèdent dans un rythme constant (on ne s'ennuie pas) et sans pathos encore ; nous sommes au cinéma et il y a ce qu'il faut de description pour sentir en-dessous de soi le sol qui tremble sous la caravane des comédiens et la langueur de leur feu du soir, pour sentir qui le luth sous ses doigts, qui ses poches vides et le ventre creux, qui les rues agressives de Tarbean et la neige entre les pavés sous ses pieds nus, qui l'Université, qui la fameuse Université, l'odeur du parchemin, de la poudre, de l'animosité, de l'amitié et puis aussi, l'immense, le délicieux et enivrant parfum de Dennah.
Un peu de vocabulaire à appréhender - on aurait pu se passer d'une mesure du temps différente je pense mais ce n'est pas grave - mais c'est tout, le reste est une légende en train de s'écrire et de se construire sous nos yeux de lecteurs avides d'en savoir davantage. La traduction est leste et efficace ; on en redemande. Et à la fin, quand on fini les 800 pages, on se demande. Tant de questions encore à éclaircir. Est-ce bien pertinent de se lancer de nouveau dans une saga non achevée ?
La réponse est oui : lancez-vous, lançons-nous. Tant pis s'il n'y a rien au bout, le vol seul est merveille.
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