Rêves sous haute surveillance

Dans un empire ottoman imaginaire, le Tabir Sarrail - ou Palais des rêves- est une institution centrale. Ses fonctionnaires étudient les rêves des citoyens pour protéger l'état de toute calamité et choisir le Maître-rêve, un rêve particulièrement révélateur, offert au Sultan lors d'une cérémonie annuelle. Car d'après la tradition Allah enverra ses messages les plus importants dans l'inconscient de la population, au moyen des songes. Ce roman nous raconte l'ascension professionnelle de Mark-Alem, rejeton de la puissante famille des Kuprili, depuis son recrutement au Tabir Sarrail comme simple trieur de rêves, jusqu'à sa nommination dans la haute administration du palais comme interprète. Peu à peu absorbé par l'atmosphère hypnotique du Sarrail, Mark-Alem se dédie corps et âme à sa tâche, oubliant le monde extérieur, ... jusqu'au jour où il découvre un rêve qui semble incriminer sa propre famille. C'est alors que se déclenche une effroyable mécanique destinée à broyer d'éventuels conspirateurs trahis par leur inconscient.

"Le palais des rêves" a été publié en Albanie en 1981 sous la dictature d'Enver Hodja. Dans ce roman fantastique et dystopique, Ismaïl Kadaré dénonce le régime totalitaire existant alors dans son pays, ce qui lui vaut la censure, la persécution politique et finalement l'exil en France. Dépositaire vivant de la culture albanaise, Kadaré est un très grand écrivain qui aborde des thématiques universelles. Il a été traduit dans plus de 40 langues et a reçu de nombreux prix littéraires.

J'ai été fascinée par ce livre dès la première page en raison de son atmosphère onirique et de l'originalité du sujet. L'écriture de Kadaré, à la fois classique et dense, emporte rapidement le lecteur sur les traces de son héros, dans les méandres inquiétants du Palais des Rêves.