Je ne connais l’œuvre de Zola qu’au travers de ses quelques romans étudiés au cours de ma scolarité. C’est donc curieuse que j’ai découvert ce texte qui tient du conte philosophique avec un petit côté fantastique, la parole étant donné aux chats. Bien que je ne sois pas spécialiste de cet auteur, je pense qu’on y retrouve sa patte notamment dans sa façon très réaliste de dépeindre le Paris de l’époque et dans l’écriture qui tend vers la critique sociale.

J’avais, au fond d’une armoire, une véritable chambre à coucher, coussin de plume et triple couverture. La nourriture valait le coucher ; jamais de pain, jamais de soupe, rien que de la viande, de la bonne viande saignante.

En effet, l’histoire est celle d’un bon gros matou de salon, habitué aux grand luxe et au confort que sa maitresse lui prodigue à grand renfort de coussins moelleux et de viande à tous les repas. Envieux de la liberté dont semblent jouir les chats de gouttière qu’il voit à travers sa fenêtre, il prend la poudre d’escampette pour les rejoindre et goutter à cette vie de la rue. Mais quand la faim se fait sentir, il comprend que la liberté a un prix…


Je dois bien reconnaître que si le texte ne m’a pas laissé indifférente, ce sont principalement les illustrations de Timothée Le Veel qui m’ont séduite. Entièrement réalisées au crayon de couleur, chacune dégage une certaine douceur qui donne à l’ensemble un côté cotonneux parfaitement adapté au fantastique du récit. Un fantastique qui s’exprime aussi dans la couleur bleue du matou qui, de fait, se confond aux peluches de sa chambre.

Les caresses me semblaient fades, la mollesse de mon lit me donnait des nausées, j’étais gras à m’en écœurer moi-même. Et je m’ennuyais tout le long de la journée à être heureux.

Des peluches qui sont d’ailleurs bourrées de références à des dessins animés ou personnages tels que Babar, Dumbo ou encore Fantasia pour n’en citer que quelques uns. Les références sont d’ailleurs divers et notamment artistiques avec cette représentation d’une jeune ouvrière aux allures de La Laitière de Vermeer, ou ces représentations d’affiche de la Tournée du Chat Noir de Steinlen ou celle pour le Cirage du Lion Noir de Charles Léon Méry…


Tout cela vient nourrir l’univers dans lequel évolue notre chat de salon et donne vie à la ville de Paris que l’on reconnait dès les premières pages avec ce plan en plongé de la ville de nuit, la Seine s’écoulant en son centre, ou ces représentations du Pont Alexandre III et ses lanternes ainsi que de la Cathédrale Notre-Dame et ses gargouilles, sans oublier bien sûr les toits de la ville, si typiques de la capitale française.

Mais la rue n’est donc pas à nous ? On ne mange pas, et l’on est mangé !

Je suis donc particulièrement charmée par l’univers de Timothée Le Veel qui s’illustre dans toutes les références qu’il a su intégrer à ses illustrations comme autant de clins d’œil à des artistes qui pourraient l’inspirer. Par ailleurs, avoir choisi d’illustrer un auteur comme Zola, est une façon vraiment agréable de mettre un texte classique à hauteur d’enfants. On pourra aussi saluer le choix de préserver le texte intégral pour garder une certaine authenticité sur une époque révolue, avec ce qu’il peut y avoir de dérangeant aujourd’hui… En ce qui me concerne, la violence de la fin a été difficile à accepter.

Je goûtai largement la volupté d’avoir chaud et d’être battu. Pendant qu’elle me frappait, je songeais avec délices à la viande qu’elle allait me donner ensuite.
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le 19 févr. 2024

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